Une initiatrice et des amis éparses, chacuns enthousiasmés par le projet. C’est comme ça que nous nous sommes retrouvés tous les cinq, Sophie, Pierre, Loup, Maëlle et Elise, autour d’une expédition commune.

L’élu de notre coeur sera la rivière d’eau vive, imprévisible, sauvage et reculée de l’Allier. Au programme : 5 jours de complète autonomie, à descendre la rivière en packraft. Le soir, c’est sur les berges que nous installerons le campement au bord d’un feu de camp et, croisons les doigts, peut- être, osons le, une truite fraîchement pêchée !

Coup de pagaie dans l’Allier

Une envie de rêver. De trouver de l’inspiration. De créer son projet en se basant sur l’expérience d’autres. Une idée partagée autour de soi, lors d’une discussion autour d’un repas. Une initiatrice et des amis éparses, chacuns enthousiasmés par le projet. C’est comme ça que nous nous sommes retrouvés tous les cinq, Sophie, Pierre, Loup, Maëlle et Elise, autour d’une expédition commune.

L’élue de notre cœur sera la rivière d’eau vive, imprévisible, sauvage et reculée de l’Allier. Au programme : 5 jours de complète autonomie, à descendre la rivière en packraft. Le soir, c’est sur les berges que nous installerons le campement au bord d’un feu de camp et, croisons les doigts, peut- être, osons le, une truite fraîchement pêchée !

Commencement (19/09 – 21/09)

Notre aventure commence le samedi 19 septembre au matin. On quitte le tumulte de la ville pour rejoindre la maison isolée de Dom, dans la région des Ardennes Bleues. Jalhay, son refuge, sa terrasse abritée, sa forêt environnante et les Fagnes seront notre chez-nous pour le week-end. Nous restons là en attendant que les packrafts, utilisés par un autre groupe, nous reviennent en Belgique.

Dom n’est pas encore là. Mais il nous laisse l’entier accès à sa maison. Sans condition, sans règle. Ici la règle c’est le partage et la confiance. Ce week end de transition est parfait pour apprendre à se connaître, à faire groupe. Un bon teambuilding avant de se crier dessus dans les rapides de l’Allier! Des parties de jeux de société, des siestes, une grande balade, quelques bières, un barbecue et des brâmes de cerf plus tard, nous voilà prêts à recevoir les conseils de Dom, revenu de son expédition en Suisse.

La rivière est un élément de la nature excitant mais imprévisible et que rien ne peut arrêter. L’eau coule, les rapides sont là et nos embarcations toujours constamment poussées vers l’aval. L’eau tourbillonne, pousse, bloque, emporte. Prudence, vérification, humilité et sagesse sont les maîtres mots pour que ce type d’aventure reste un plaisir. Nous apprenons à comprendre le matériel, son utilisation précautionneuse. Mais aussi et surtout les compréhensions théoriques de la rivière, les exercices pratiques et les bases de sécurité. Le savoir a été transmis, nous sommes prêts à partir à l’aventure.

Quand Dom parle, on sent tout l’amour de l’expédition. L’aventure ce n’est pas juste partir et s’en mettre plein la vue, et en mettre plein la vue aux autres. Partir c’est aller à la rencontre de la nature, et à la rencontre de soi. C’est apprendre à prendre le temps de se poser sur ce qu’on ressent, et apprendre à partager ses émotions, ses réflexions. Et ces apprentissages, les garder en nous et continuer à les faire fleurir dans nos vies de tous les jours. Pour le Cap Expé, l’aventure n’est pas une parenthèse mais une manière de vivre, qu’on garde en nous et qu’on partage avec les autres. Un rêve mis en musique, un élan qu’on suit jusqu’au bout.

Équipés de kilos de cracanut et de bonbons, on engage notre première descente : 850km vers Prades, notre point de départ aquatique.

Nuit sur une aire de bivouac.

Arrivée tardive et dans la noir. On devine et on entend l’Allier qui coule à quelques mètres. Feu de camp, repos sous la tente avant le grand jour J! Il pleut, on est serrés dans les tentes et dans nos sacs de couchage. On est heureux et impatients. Programme des prochains jours : départ en packraft de Prades, pour faire deux jours de navigation sur un tronçon niveau 1 et 2 en difficulté. Si on se sent à l’aise, on quitte l’eau, on prend un train qui nous remonte vers l’amont de la rivière, pour enchaîner trois jours de rivière niveau 2, 3et 4.

Premiers coups de Pagaie (22/09)

Cette expédition nous l’avons imaginée, pensée, organisée, partagée et mise en place. La voici, maintenant. L’eau est là, fraîche et active, juste au bout de nos pieds. On organise les packrafts : tout empaqueter, protéger, à insérer dans ou sur le packraft. Tous à l’oeuvre, comme un petit groupe de fourmis qui s’affaire méthodiquement.

Premiers coups de pagaie. La joie. On y connait rien. Cette sensation de tout découvrir, comme des enfants. Premiers mètres. Très rapidement, déjà, les premières appréhensions. Sur la berge, un local nous prévient qu’au prochain virage, on sera tous dans l’eau. Premier rapide. On sort des embarcations, on analyse. Entre quels rochers passer, à quel moment donner un gros coup de pagaie..? Un à un, on se lance. Certains confiants et excités, d’autres sereins, d’autre les yeux ronds et à deux doigts de laisser s’échapper un pipi de terreur. Finalement, tout le monde se retrouve de l’autre côté du virage, sans encombre.

On évolue dans des vallées verdoyantes. On glisse le long de villages de pierre. On passé sous de beaux ponts. On longe les champs. Entourés tantôt de bruits de flots tranquilles, ou emportés dans remous bouillonnants et bruillants. Personne sur l’eau à part nous, les cinq gros canards bleus, rouges et jaunes.

Quand on s’arrête de pagaier, on entend les oiseaux qui chantent autour et on se laisse simplement bercer dans les bras de l’Allier.

Une belle première journée, remplie de découvertes et de sensations. Qui a laissé s’échapper quelques soupirs de plaisir, quelques cris d’adrénaline, quelques oufs de soulagement, quelques slogans d’encouragement. Bivouac au bord de l’eau. Feu de bois pour sécher nos vêtements et corps trempés. Pêche pas en encore fructueuse. Préparation d’une tartiflette au reblochon. Marshmallow, histoires partagées, devinette et nuit noire à 21h.

Élise

Grand Soleil sur l’Allier (23/09)

On se lève sur le campement encore brumeux. Le soleil pointe vite le bout du nez, une belle journée s’annonce. La logistique du matin est déjà plus rapide que la veille: thé, porridge, rangement stratégique des sacs, démontage des tentes, on a vite intégré notre routine. Vient ensuite le moment plus critique: enfiler nos affaires encore trempée de la veille. Une fois nos gilets de sauvetages et jupettes de protections mises, on embarque avec joie. On retrouve vite les sensations sur l’eau et l’adrénaline dans les rapides. Aujourd’hui la rivière est plus calme, on doit donc utiliser davantage nos bras. On profite des passages plus lent pour faire des pauses bonbons ou des photos de groupe, tout cela sous un grand soleil, le rêve. Vers midi on se trouve une belle berge verte. On sort le pic-nic et la canne à pêche ! On pêche des branches et on fait les crêpes au soleil en se racontant nos rêves de voyages. La belle vie !

Les derniers kilomètres passent vite. On est seul au monde sur cette rivière, on ne croise personne à part des hérons peu farouches. Nous arrivons à Lavoûte-Chilhac, émerveillés par la beauté du village. On débarque tout en dessous du pont. Cette fois ci il faut tout embarquer, packraft, casques et pagayes compris, car nous sommes prêts à affronter le Haut Allier !! Apres un verre sur la terrasse du village, nous voila prêt à remonter la rivière vers nos prochaines aventures. Malgré la motivation, personne ne nous prend en stop la première heure. On commence a stresser pour notre train. Plus de peur que de mal, Loïc et son fils, Nola nous embarquent tous dans leur truck à remorque. On découvre l’ambiance locale et la vie de jeunes dans la région. Très belle rencontre, on échange d’ailleurs nos numéros pour se retrouver avant de repartir.

On attend notre train en jouant à Celestia et mangeant quelques biscuits. Le trajet en train passe vite. Nos visages collés aux vitres, on observe ce qui nous attend en commentant tour les rapides. “Beaucoup d’infran selon Sophie”.

Le paysage est incroyable, on s’enfonce dans les terres et la nature. Arrivé à Chapeauroux les locaux nous indiquent directement le camping. Douche chaude et repas au sec dans les sanitaires car la pluie est revenue. Chocolat et rikkiki au programme de la soirée. On va dormir en rêvant aux rapides qui nous attendent. A partir de demain c’est Ranga riveeer. On est prêt à affronter le courant, la pluie et même le froid !!

Maëlle

A la découverte du haut Allier (24/09)

Le petit déj se fait dans notre nouveau QG = les sanitaires. Eh oui, la météo n’est pas très clémente et nous profitons de notre dernier abris avant 3 jours de pluie et de froid annoncés (les températures vont baisser jusqu’à 3 degrés et les averses seront fréquentes, ça risque d’être marrant!)

Les riverains sont tout de même étonnés de nous voir partir par cette météo mais ils mettent ça sur le coup de notre nationalité: les belges et la pluie ça fait bon ménage.

Une fois empacté, nous découvrons notre nouveau terrain de jeu: le haut Allier avec un courant un peu plus fort, des rapides plus fréquent et un niveau de difficulté légèrement augmenté. Il ne nous faudra donc que quelques minutes avant d’assister à la première gamelle de notre chère Maëlle. Ne faisant pas les choses à moitié, elle se retrouve au milieu du rapide dépourvu de son packraft et de sa pagaie, le regard un peu paniqué par le parcours à emprunter désormais à la nage.  Ceci sera donc la première épreuve pour nous tous : rassembler les affaires, sécuriser les lieux et retrouver notre compatriote quelques mètres plus loin saine et sauve!  

Le reste du parcours se déroule comme sur des roulettes, on prend notre pied sur les paysages un peu plus sauvages de cette rivière jusqu’au village d’Alleras. 

Un panneau un peu plus loin attire notre attention. Il indique: “danger, lit de rivière impraticable.” On s’arrête pour analyser la situation: le niveau d’eau est un peu plus bas mais avec nos bateaux ça devrait passer. On lit le topo qui nous indique que l’on peut continuer jusqu’au barrage où il faudra s’arrêter pour prendre un escalier sur notre gauche pour passer de l’autre côté. L’ambiance est particulière: la météo est menaçante, nos regards un peu stressés. Des souvenirs vagues du train nous rassurent: on aurait vu un lac avant le barrage pour nous arrêter tranquillement. Evidemment, nos souvenirs sont éronnés et nous nous retrouvons face à un barrage en chantier ou il est difficile de s’arrêter. Sophie chute en essayant de se mettre sur le côté, la panique est bien là mais tout le monde arrive à s’arrêter à temps.

 A peine accosté, le chef de chantier vient à notre rencontre pour nous questionner et nous sensibiliser à la dangerosité de la situation. La faute est partagé: aucun panneau indique le chantier et nous ne pouvions donc pas savoir que nous allions débouler là…

 Il suffirait de traverser le chantier pour rejoindre l’autre côté de la rivière mais c’est évidemment indiscutable: nous allons devoir être escorté jusqu’à la limite du chantier, monter jusqu’à une route déserte, marcher quelques kilomètres puis finalement descendre dans une forêt en azimut pour retrouver la rivière. La fin de la journée s’annonce donc mouvementée. 

C’est donc après toutes ces étapes avec en prime une petite perte de matos au milieu de l’azimut dans les bois (que nous finirons par retrouver) que les troupes fatiguées, content de se réchauffer autour du feu, débriefent de cette longue journée. Le spectacle du train éclairé passant au dessus de nous marque la fin de cette belle étape. 

Sophie

Coup de froid (25/09)

Après une journée pourtant bien mouvementée, la nuit ne fût pas de tout repos. L’espace pour planter la tente étant ce qu’il est, il fallu batailler toute la nuit pour s’octroyer quelques heures de sommeil sur les rochers qui jonchent le sol. Mais ce n’était pas une courte nuit qui allait entacher le moral des troupes en ce matin glacial. L’absence du café matinal, par flemme pour certains ou par économie d’essence pour d’autres, a par contre fait grincer quelques dents. C’est donc avec une température ambiante avoisinant les 6°C que nous nous lançons dans la rivière pour affronter ce que nous croyons être notre avant-dernière journée sur l’eau.

Dès les premiers rapides, nous comprenons que la journée sera difficile. Déjà 2 packcrafts renversés, une pagaye en roue libre et tous trempés jusqu’à l’os… Nous sommes en train de payer un lourd tribu à cette rivière qui semble nous échapper petit à petit. Les premières heures passées sur/dans/sous l’eau de ce matin du 25 septembre sont apocalyptiques. Nous continuons tant bien que mal à affronter l’Allier et son lit capricieux avec courage et détermination mais la chute d’Elise, pourtant très à l’aise jusque là, est celle de trop. La panique peut se lire dans les yeux de Pierre lorsqu’il voit Elise lâcher la ligne de vie après avoir bu 3 fois la tasse et s’engouffrer, le regard vide, dans les méandres de la rivière impitoyable… Heureusement, Loup et Maëlle, un peu plus en aval du cours d’eau, peuvent intercepter la naufragée saine et sauve et regagner la berge avec l’embarcation laissée à son sort.

Les organismes sont exténués. Il faut s’arrêter coûte que coûte. Nous trouvons un semblant de plage où accoster pour essayer de nous réchauffer et reprendre des forces avant de poursuivre notre périple, parce qu’il le faut… Continuer à pied n’est pas une option. Nous sommes perdus au beau milieu des gorges de l’Allier et la seule route qui s’offre à nous est celle que nous avons quittée une heure auparavant.

Après avoir balayé l’idée d’un sauvetage par hélicoptère, nous remontons sur nos embarcations, la boule au ventre, en priant tous les dieux pour que les rapides les plus compliqués soient derrière nous et que la rivière soit plus clémente à notre égard. Nous constatons au fur et à mesure de l’après-midi que nos prières n’ont pas été vaines. Nous reprenons confiance au fil des rapides et c’est finalement avec le sourire aux lèvres que nous gagnons la ville de Monistrol-sur-Allier et son camping pourvu de douches chaudes, un luxe qu’on osait à peine imaginer quelques heures plus tôt.

Le Puy-en-Velay et retour au bercail (26/09 – 27/09)

Après cette journée mémorable et un repos bien mérité, nous prenons, à l’unanimité, la décision de ne pas remonter sur l’eau aujourd’hui. Outre les rapides de niveau 4 qui s’annoncent, les températures glaciales de ce samedi matin (2°C) nous confortent dans notre décision de remballer définitivement les packcrafts. Pendant que Maëlle et Sophie rejoignent Prades en stop pour récupérer la voiture, Elise, Pierre et Loup restent au camping et rangent toutes les affaires.

Il est 11h00, la remorque est pleine, nous sommes prêt à partir. Mais il nous reste encore une belle journée pour profiter de la région avant de retourner au bercail. Un bref coup d’œil sur la carte et quelques appels téléphoniques plus tard, nous choisissions de passer cette journée au Puy-en-Velay, magnifique point de départ pour le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle. Après un petit tour dans la ville, une partie de Colt Express et un bon resto, nous profitons du festival “Puy de Lumières” pour clôturer cette douce soirée au Puy-en-Velay.

Il ne nous reste plus qu’a rejoindre le point de bivouac repéré par Pierre à proximité de Saint-Etienne pour clôturer cette journée. Mais pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? Nous ne prenons pas la peine de repérer les quelques mètres de la petite route en terre qui nous amène au lieu de bivouac et nous voilà coincé dans un infran… Grâce à Europe assistance et au dépanneur que nous sortons du lit, la voiture est tractée hors du trou le soir même.

Notre imprudence de la veille n’a heureusement pas eu de conséquence pour le véhicule. Le trajet du retour se passe sans encombre et nous voilà 8h plus tard chez les parents de Sophie pour profiter d’un dernier apéro ensemble. Nous racontons nos exploits avec des étoiles dans les yeux et c’est avec émotion que nous retournons chacun chez soi après ces quelques jours riches en expériences, découvertes et amitiés.

Pierre/Loup