Semaine de trekking et ascension d’un 5000m

Récit d’Armand

[singlepic id=3 w=150 h=240 float=left]Mercredi 5 septembre, alors que tout le matériel a été réparti, Muriel, Simon, Xavier et moi-même nous donnons rendez-vous à l’aéroport de Zaventem en début de soirée, Claire et Augustin ayant pris un autre vol pour nous retrouver directement à Tbilissi. Un premier vol de 2h30 nous emmène jusque Tallinn, capitale d’Estonie, où nous enchaînons avec une escale expéditive à traverser le terminal en courant afin de ne pas rater la correspondance dont l’embarquement est déjà quasi-clôturé, et 3h30 plus tard, nous voilà déjà à Tbilissi avec un cachet supplémentaire sur le passeport. On retrouve Augustin et Claire juste après avoir passé la douane, et on récupère nos bagages avant de se faire expulser du terminal. Comme il est quatre heures du mat’, on déroule nos matelas sur le faux gazon à l’intérieur même de l’aéroport, et somnolons jusque 8h30. Le programme de la journée est le suivant : faire des courses alimentaires, acheter de cartes de randonnée et trouver un moyen de locomotion bon marché jusqu’en Svanétie. En sortant de l’aéroport, pas même besoin de chercher un transport public jusqu’au centre-ville, un bus privé d’étudiants associés au projet Tbilisi +35 nous y dépose. Ils parlent plus ou moins tous anglais, et l’un d’eux pourtant visiblement déjà épuisé nous emmène ensuite à pied jusqu’à la gare ferroviaire, et nous aide à réserver des tickets pour le train de nuit vers Zougdidi : première étape du trajet jusqu’en Svanétie. Cela nous coûte 14 laris par personne, soit 7 €. On a maintenant jusqu’à 23h pour faire nos courses et visiter la ville. Nous laissons nos sacs à une espèce de consigne pas bon marché pour un sous à la gare, repérons un supermarché pour plus tard, et prenons le métro jusqu’à la Place de la Liberté. On est maintenant dans la vieille ville à la recherche du magasin Geoland, référence en matière de cartes topographiques de la région, mais trouver la rue en question n’est vraiment pas une mince affaire, surtout quand les gens ne connaissent pas l’endroit, ne parlent pas anglais, et que l’alphabet est tout aussi joli qu’illisible. [singlepic id=5 w=150 h=240 float=right]On finit tout de même par trouver, et nous y achetons quelques cartes de Svanétie, région montagneuse tout à fait reculée dans laquelle nous avons l’intention de passer une semaine pour y faire de la marche. Cartes en poche, on veut maintenant se faire une petit pique-nique posé, ainsi qu’un petit tour sur la crête, surplombant la ville d’un côté et le jardin botanique de l’autre. On y fait une sieste, par grand soleil, après s’être fait offrir notre premier shot de vodka dans la montée par deux jeunes géorgiens déjà en train de picoler en tout début d’aprem. Il fait torride. De retour à la gare ferroviaire quelques heures plus tard, on fait les courses alimentaires au supermarché, je m’arrange pour trouver un accès à internet afin de recevoir mes points, et on va ensuite tuer les quelques heures qu’il nous reste avec une petite bière sur le bord de la rivière Koura. Cet instant de quiétude sera troublé par les hostilités d’une bande de jeunes ados qui trouvaient très amusant de nous canarder de morceaux de bois. Ce fut heureusement un incident isolé sur tout le voyage, mais on l’avait assez mauvaise. De retour pour de bon à la gare centrale, on mange quelques spécialités locales dans un genre de fast-food, dont le fameux fromage khatchapouri. Un peu avant 23h, on embarque dans le train, où on n’a malheureusement pas réussi à obtenir des couchettes. On se contentera donc des sièges plus ou moins confortables qui nous ont été assignés pour tenter de trouver le sommeil. Au fur et à mesure du long trajet de huit heures, des places vont se libérer, nous permettant ainsi de nous allonger sur les banquettes. C’est notre deuxième nuit de demi-sommeil d’affilée.

[singlepic id=6 w=150 h=240 float=left]À Zougdidi, la dernière ville sur cette ligne de chemin de fer avant la région auto-proclamée indépendante d’Abkhazie, c’est donc le terminus. Nous sommes immédiatement repérés par des chauffeurs de marchroutka, ces mini-bus pouvant accueillir 15-20 personnes et faisant office de transports publics, qui démarrent une fois qu’ils sont complets. Nous ne sommes pas les seuls backpackers, et nous partageons une marchroutka vers Mestia, la capitale de Svanétie, comptant 2600 habitants. Elle nous amènera finalement tous plutôt à Mazeri, petit village où nous avions prévu de démarrer le trek. Cela nous a coûté environ 20 laris par personne, si je me souviens bien. On fait la connaissance avec Rastislav et Maria, un couple de slovaques qui sont aussi en Géorgie pour deux semaines, et sont pour l’instant accompagnés de 3-4 autres routards. Nous quittons rapidement la plaine pour nous enfoncer dans le Grand Caucase sur une route de montagne fraichement asphaltée. En effet, les guides touristiques nous annonçaient plus de six heures pour les 120 kilomètres de route, alors que nous en avons mis trois en pratique, en comptant les nombreux arrêts. Avec maintenant un litre d’essence acheté pour le réchaud, nous voilà parés. Pour les 450 kilomètres qui séparent Mestia de Tbilissi, on aura mis douze heures. Les derniers kilomètres en direction de Mazeri sont sur une piste, à l’écart de la route Zougdidi-Mestia. Le village, à une hauteur d’environ 1700m, est très épars et plein de cochons. Le chauffeur nous dépose tous devant une espèce de guesthouse où nous sommes évidemment immédiatement invités. Mais contrairement à nos confrères du trajet, nous avons nos tentes et suffisamment de nourriture, donc nos chemins vont rapidement se séparer. [singlepic id=16 w=150 h=240 float=right]Nous avions imaginé commencer par une promenade d’une journée aller-retour en direction du glacier d’Ouchba et sa fameuse cascade, mais le tenancier de la guesthouse nous explique qu’on a besoin d’une autorisation spéciale de la police pour emprunter ce chemin, vu l’importante présence militaire au pied d’un col de haute montagne qui marque la frontière avec la Russie. On n’a jamais vraiment cru à cette histoire, d’autant que Rasto et Maria ont pu le faire sans problème comme on l’apprendra par la suite, mais on n’a pas le temps d’attendre et gagner une journée sur le programme initial n’est pas forcément une mauvaise idée. Un peu avant 12h30, nous voilà enfin partis pour un premier trek de seize kilomètres en direction de Mestia, qui devait en principe prendre un total de dix à douze heures, avec un seul col à franchir à 2950m. Le tenancier faisant de nombreux signes de croix en nous voyant partir, nous voilà rassurés. Les conditions de cette première journée de marche sont absolument incroyables : l’ascension se fait en plein soleil. La montagne est verdoyante. Nous prenons notre temps, et faisons une étape d’environ 4h30 qui nous rapproche du mont Ouchba. Du haut de ses 4710m, ce dernier est considéré comme le « Cervin du Caucase » à cause de son air proéminent. Vers 17h30, nous profitons de la dernière heure de soleil pour faire une petite baignade dans le torrent glacial, qui coule directement depuis les glaciers de l’Ouchba. Nous remontons dresser le camp un peu plus haut, sur une pelouse pas tout à fait plate, mais c’est ce qu’on a trouvé de mieux. Nous sommes à environ 2400m, et on a deux tentes de trois personnes. Vers 20h, il fait déjà noir, et après un repas de riz un peu cramé, on termine une bouteille de vodka dans la tente.

[singlepic id=28 w=150 h=240 float=left]Samedi 8 septembre, on se lève à dix heures, et malgré le sol un peu incliné, cela fait du bien d’avoir enfin eu une vraie nuit de sommeil. Nous mettons deux heures pour tout replier et manger le porridge. Aujourd’hui, le ciel est couvert et on ne voit plus le sommet de l’Ouchba. On retrouve rapidement un sentier balisé, que nous suivons sans nous poser de questions étant donné que la carte n’en indique qu’un seul. Après 1h30 de marche, on arrive dans la caillasse au pied du glacier Gula. Ici, il n’y a plus de balises mais la direction à suivre est évidente, et 45 min plus tard, l’altimètre nous indique 3100m, soit 150m plus haut que le col visé. Mais on ne se pose pas de question, et comme on aperçoit un col plus loin, on décide de continuer, après un petit pique-nique. À 16h15, après une montée un peu casse-gueule sur une caillasse particulièrement instable, on arrive enfin au col. [singlepic id=37 w=150 h=240 float=right]La vue en contre-bas de l’autre côté, sur un glacier qui rappelle la Mer de Glace de Chamonix, est absolument spectaculaire, mais force est de constater qu’on n’est pas au bon endroit. En effet, la pente est trop raide pour être praticable, et à aucun moment on n’est sensé rejoindre de glacier. On comprendra plus tard qu’il s’agissait du glacier de Chalaati, et que l’altimètre ne se trompait pas : on était bien à 3300m. On fait demi-tour en retraversant toute la caillasse, jusqu’à la dernière balise aperçue située dans les alpages. Difficile de se resituer sur cette carte 1:50 000 et de savoir quelle a été notre erreur. Vers 18h15, pendant que les hommes plantent les tentes sous un sympathique soleil de fin de journée, les femmes partent en éclaireur. Nous sommes à 2850m. Les filles émettent finalement une hypothèse vraisemblable sur notre position et la direction qu’on va devoir suivre demain. On mange des pâtes à la sauce tomate, et on se couche dès qu’il fait noir. Malheureusement, ce n’est pas encore cette nuit qu’on sera couchés sur un terrain plat.

[singlepic id=48 w=150 h=240 float=left]Dimanche matin, on se réveille à 7h. Il y a du givre sur les tentes et on n’a pas spécialement bien dormi. Le ciel est bleu et les nuages restent dans la vallée. Il est 8h40 quand on a fini de petit-déjeuner et de replier les tentes. Nous voilà repartis, alors que le soleil fait son apparition derrière la montagne. On longe la montagne à flanc afin de rejoindre une autre vallée. Arrivés à un glissement de terrain, nous le longeons en montant une dernière pente relativement raide, et vers 10h15, avec un jour de retard, nous arrivons enfin au col de Guli. Il est situé à 2950m et couvert de gazon. Nous sommes étonnés à quel point le Caucase est vert, et ce jusque très haut. Nous y croisons même des vaches qui pâturent. La vue est magnifique, avec le mont Ouchba derrière nous et d’autres sommets enneigés qui apparaissent de l’autre côté. On entame la descente vers Mestia, particulièrement raide au début, à tenter d’éviter de s’accrocher aux berces du Caucase. Nous nous méfions maintenant des balises et enchaînons les azimuts. Nous traversons une rivière et pique-niquons vers 13h30. Entre temps le ciel s’est couvert. La carte indique deux chemins différents vers Mestia. Le premier est le plus direct mais implique une marche d’un ou deux kilomètres sur route afin de rejoindre la ville, et le second redescend en plein centre, mais implique de remonter immédiatement de deux-cent mètres sur une crête qu’on aperçoit d’ici. Comme il est encore tôt, on opte pour cette deuxième option. Comme nous l’avions estimé, remonter nous a pris environ 1h30. On a droit à de courtes averses. Depuis la crête, située à environ 2400m, une piste redescend vers Mestia. On y croise plusieurs groupes de touristes, les premiers depuis Mazeri, qui font tous la promenade aller-retour d’une journée vers les lacs de Koruldi, plus hauts sur la crête, en sens opposé de Mestia par rapport au croisement où on se situe. [singlepic id=65 w=150 h=240 float=right]Des israéliens ne nous recommandent pas spécialement la promenade vers ces derniers, qu’ils estiment à une heure de marche d’ici. Sur la crête, il y a également de nombreux pâturages, avec vaches et chevaux. Comme le terrain est plat, et qu’on désire planter la tente avant Mestia, on va le faire juste un peu plus bas. En effet, on ne pense pas pouvoir trouver d’endroits adéquats encore plus bas, car cela se raidit. On se méfie tout de même un peu de l’exposition de cette crête car des nuages gris menacent au loin, mais on espère que l’orage ne va pas éclater. Simon plante cette fois-ci pour la première fois du voyage son tarp de 700 grammes qu’il a pris avec, ça nous fait donc un campement de trois tentes. Pendant que Muriel, Claire et Simon cuisinent, Xavier, Augustin et moi-même décidons de tout de même monter jusqu’aux lacs. Il est 17h30 quand nous partons, et on y arrive en cinquante minutes. On imagine que sous certaines conditions, l’endroit pourrait être magnifique, mais le manque de soleil et surtout le manque d’eau dans les lacs qui a plutôt laissé place à une étendue boueuse ne rendent effectivement pas l’endroit très photogénique. Heureusement, dans la descente, on a eu droit à des magnifiques jeux de lumière de fin de journée sur les crêtes ainsi qu’à un double arc-en-ciel irréprochable allant de bout en bout, d’où une descente qui a pris quasiment plus de temps que la montée. On arrive au campement vers 19h15. On mange du blé accompagné de Minute Soup et d’oignons, pour un repas finalement pas si mal malgré un petit arrière-gout de cramé. Il a plu toute la nuit.

[singlepic id=77 w=150 h=240 float=left]Lundi 10 septembre, la pluie a cessé mais il fait toujours aussi couvert. Partis un peu après 9h, on en a pour deux heures de descente avec un peu de brume jusque Mestia, située à 1500m, en suivant de nouveau les balises plutôt que la piste. La petite ville de Mestia, capitale de Svanétie, n’est pas incroyablement belle mais le contraste est amusant entre la partie soviétique et la vieille ville, remplie de tours de défenses du XIème siècle, typiques en Svanétie. Dans la rue principale, on est sidérés par les travaux : la plupart des maisons sont activement en construction. À peine posés sur la place centrale, on aperçoit Rasto et Maria devant l’office du tourisme, ils nous racontent leurs périples à la cascade d’Ouchba et la manière dont ils se sont perdus, comme nous, en tentant de rejoindre Mestia à pied, mais sans carte. Comme on a perdu un peu de temps, on désire faire un aller-retour sur Ouchgouli en voiture plutôt que d’y aller à pied, ce qui mettrait quatre jours de plus rien que pour l’aller, dont deux sur la route. Ils désirent faire la même chose. On décide donc de partager les frais d’un trajet privé en camionnette, le village étant assez mal desservi par les marchroutkas. On est un peu réticent à payer 200 laris pour 45 kilomètres, mais il s’agit d’un trajet de trois heures sur une piste en assez mauvais état. Maria arrivera à négocier le prix jusqu’à 170. Cela reste cher, même divisé par 8, mais on n’a pas envie de perdre trop de temps et on sait que le stop ne sera pas si facile. Après quelques rapides courses, nous voilà donc partis. On fait une courte pause pour remplir les bouteilles à une source d’eau minérale, particulièrement ferrugineuse comme souvent dans le Caucase, c’est vraiment infect, mais « c’est bon pour la santé » qu’ils disaient ! La région est particulièrement inhabitée, et on ne croise quasiment aucun autre véhicule sur la route. Ouchgouli est une charmante communauté de quatre villages recommandée par tous les bons guides touristiques. On y arrive donc vers 16 heures. [singlepic id=86 w=150 h=240 float=right]À une altitude qui varie entre 2086 et 2200m, il s’agirait du plus haut village habité d’Europe, situé juste au pied du mont Chkhara, le plus haut sommet de Géorgie dont l’altitude varie selon les cartes mais qui pourrait bien s’élever à 5193m. Ouchgouli est, lui aussi, parsemé de tours de défense du XIème siècle, si remarquables en Svanétie. En nous déposant, le chauffeur nous explique que le village est composé « exclusivement de guesthouses ». Et en effet, on nous en propose immédiatement une. À un prix de 35 laris par personne en demi-pension, Rasto et Maria nous assurent que cela est raisonnable. On s’installe, et à 17h, on commence une petite promenade à huit vers un sommet voisin d’où nous espérons voir le coucher de soleil. Vu comme le ciel est couvert, c’est un peu optimiste, mais qu’à cela ne tienne, on va jusqu’en haut ! Ce petit sommet n’avait l’air de rien, pourtant la montée d’1h40 a finalement été assez sérieuse, d’autant qu’on est montés jusqu’à une altitude de 2950m, Xavier en tête. Au début, le Chkhara est couvert de nuages, mais après un quart d’heure, grâce aux derniers qu’on a attendu, le sommet se découvre enfin, et de plus en plus, avec en prime une magnifique lumière de fin de journée. On sort tout l’attirail, car c’est l’heure d’une bonne vieille séance photos. Mais on ne peut pas s’éterniser, tout d’abord parce qu’on se les gèle, et ensuite parce que le souper est servi à 20h à la guesthouse. Nous redescendons en courant, et arrivons juste à temps, alors que le dernier quart d’heure de marche s’est fait dans l’obscurité, bien sûr sans avoir pensé à prendre les frontales. On mange un vrai bon repas local, avec soupe, khatchapouri et tout le reste. Ensuite, comme nos hôtes n’ont pas l’air de vouloir nous faire la causette ni picoler avec nous comme on s’y était attendus, on va se prendre quelques bières dans un café voisin avant de rejoindre nos lits.

[singlepic id=90 w=150 h=240 float=left]Mardi 11, on se fait engueuler au petit-déjeuner pour le bruit qu’on a fait en rentrant la veille, donc on n’ose pas demander d’y laisser nos sacs pour la journée. Alors que Rasto et Maria commencent une promenade, à remonter la vallée en pente douce jusqu’au pied du Chkhara, nous préférons passer une journée de repos à visiter le village et tenter de trouver un moyen de transport meilleur marché vers Mestia. Il fait de nouveau grand soleil. On se pose avec nos sacs à côté d’une tour qui domine le village. On est vite rejoints par des ouvriers qui construisent un hôtel à deux pas de là, et qui nous conseillent de monter dans la tour de défense. Il n’y a ni échelle, ni escaliers, et ils nous montrent par où escalader jusqu’à la première fenêtre. Pas tout à fait rassurant, mais en fin de compte plutôt marrant ! Après un petit tour jusqu’à l’autre bout du village, on revient au même endroit, et on se fait cette fois offrir à la fois un lift vers Mestia le soir même dans une benne de camion, et des litres de vin. Ils étaient plusieurs, mais le seul dont on a retenu le nom était Roma. On pique-nique, on picole avec eux, ils nous racontent plein de trucs marrants, puis ils retournent travailler. [singlepic id=115 w=150 h=240 float=right]Rasto et Maria reviennent de leur promenade, on leur explique qu’on a trouvé un lift pour eux, et on va se prendre un café en terrasse. Évidemment, une heure plus tard, voilà Roma et un des autres qui arrivent à la même terrasse avec quatre litres de bière. Après les avoir vidés, on se sent obligés d’en remettre une tournée. Le camion arrive une heure plus tard que prévu, vers 17h. Il décharge le ciment, puis on embarque, et nous voilà partis dans la direction opposée de celle voulue. On n’avait pas trop pigé qu’il fallait d’abord passer chercher des pierres à la rivière. Et comme le pont est trop étroit pour cet énorme Kamaz, on la traverse en camion. On balance des pierres dans la remorque, avec de temps en temps un petit shot de « chacha » pour nous encourager, qui est une sorte de vodka géorgienne fortement alcoolisée. C’est le début de la fin. Une dernière bière à côté du futur hôtel après avoir déchargé les pierres, et nous voilà partis vers Mestia, hommes dans la benne et femmes en cabine. Il est 19h passé. Il fait rapidement noir et frisquet, mais un fort taux d’alcool aidant, les trois heures de trajet sont passées plus rapidement qu’à l’aller. En arrivant à Mestia, on remercie le chauffeur, on le paye 50 laris pour nous 8, et on entre dans un autre véhicule, d’un mec qui nous ramène à sa guesthouse et nous promet une marchroutka vers Zougdidi le lendemain à 6h, au même tarif qu’à l’aller. Les tours de défense sont éclairées la nuit, c’est assez joli. Rasto et Maria se prennent une chambre tandis que nous plantons les tentes gratuitement dans son jardin.

[singlepic id=120 w=150 h=240 float=left]Mercredi, on a un peu de mal à se lever si tôt, et les tentes sont repliées juste à temps pour l’arrivée de la marchroutka, sans petit-déjeuner. Avec une bonne gueule de bois pour certains, on se promet une bonne journée de repos à la mer. La route vers Zougdidi est infernale, chaque tournant est un supplice pour l’estomac, et la vitesse du chauffeur n’arrange rien. La pause au bord du lac d’Ingouri pour manger un bout vient comme une délivrance. On arrive finalement à la gare ferroviaire de Zougdidi, où on réserve immédiatement les tickets pour le train de nuit vers Tbilissi au même prix qu’à l’aller, et où on nous explique que pour trouver un bus vers Anaklia, station balnéaire la plus proche, il faut se rendre à l’autre gare routière un petit kilomètre plus loin. Rasto et Maria prennent quant à eux une autre direction : le parc national de Borjomi et le site troglodyte de Vardzia. On tombe sur David, un géorgien qui nous conduit jusqu’à la bonne gare. Il faut prendre « le bus jaune » de midi. Comme on a encore faim, on rachète quelques pains fourrés et autres amuse-gueules. David va finalement adapter son programme de la journée pour nous accompagner jusqu’Anaklia et y faire la promotion de son entreprise de noisettes. Le trajet en bus dure une heure au tarif d’un lari par personne, nous sommes un peu serrés mais c’est de l’ordre du raisonnable. [singlepic id=121 w=150 h=240 float=right]David nous l’offre. Il fait également superbe à Anaklia, nous y sommes accueillis par une allée de palmiers. La ville est assez surréaliste, avec ses luxueux hôtels et casinos pour étonnamment peu de clients. Et c’est à peu près tout ce que comporte la ville. David nous répète sans cesse qu’on doit y investir. Le parc aquatique semble quant à lui plus peuplé. L’eau de la Mer Noire est particulièrement bonne. L’après-midi se résume à : baignades, bains de soleil, séchage de tentes et d’affaires, Magnum et conversation avec David. Heureusement, ce dernier nous a laissé respirer l’espace de deux heures pour aller distribuer ses flyers. Quand il revient, on en a plus que marre de ses énumérations de noms de philosophes et de grandes entreprises, et de ses questions sur le PIB, le taux de chômage et la présence ou non de vaches et de chevaux en Belgique. Muriel, Simon et moi allons faire un petit tour sur le pont, jusqu’à l’Aquapark. À 19h, c’est l’heure du dernier bus. On est cette fois-ci serrés comme des sardines, au point d’en rendre le trajet insupportable. Le bus doit refuser des gens à chaque arrêt. Et pour couronner le tout, David tente de continuer son assommante conversation. « Invest autobus » répétait-il sans cesse. À la gare ferroviaire de Zougdidi, il prend enfin congé de nous. Il ne nous aura finalement jamais rajoutés sur Facebook. On mange quelques amuse-gueules en attendant le train et on se fait offrir des bières par des jeunes très sympathiques. À 22h, nous voilà partis. Le train doit arriver à Tbilissi à 6h45, mais on hésite à sortir plutôt à Gori à afin de visiter au moins une cité troglodyte, celle d’Ouplistikhé. On se renseigne auprès du contrôleur : on y passe à 4h45.

[singlepic id=129 w=150 h=240 float=left]Jeudi 13, bien que nous ayons mis un réveil, on n’aurait probablement jamais eu le courage de sortir à Gori si le contrôleur n’était pas gentiment venu nous réveiller. On se pose dans la gare de Gori pour terminer notre nuit, on n’est d’ailleurs pas les seuls à y dormir. Un chauffeur de taxi vient rapidement négocier, en écrivant sur les murs, mais je lui explique qu’on préfère d’abord dormir un peu. Vers 7h, la gare s’active, haut-parleurs y compris. On se lève, et le taximan nous rattrape. Le prix qu’il nous annonce pour nous emmener jusqu’à Ouplistikhé puis ensuite jusqu’à Tbilissi s’élève à 80 laris au total. On ne trouve pas ça excessif même si on est vraiment entassés, à six dans cette petite voiture. On quitte Gori, ville de naissance de Staline particulièrement touchée par le récent conflit de 2008 avec la Russie, dont on n’aura finalement pas vu grand-chose. On arrive à la cité troglodyte inhabitée un peu avant 8 heures, et là, grosse déception, on ne peut la visiter qu’à partir de 11 heures. Comme on doit encore aller jusque Tbilissi puis jusque Kazbegi le jour même, on ne peut pas se permettre d’attendre si longtemps. Le policier refuse catégoriquement qu’on y entre, mais ne s’oppose pas à ce qu’on contourne le village par les hauteurs. La région est aride, et fait penser au far west américain, tout à fait différent de ce qu’on a vu jusqu’à présent. On arrive rapidement au-dessus de la cité taillée dans la roche rougeâtre, mais bien que rien ne nous empêche de rentrer dedans, on est réticents car nos sacs sont tenus en otage en bas et on a peur d’être vus. On estime cependant en avoir vu assez. De retour au taxi, on en a encore pour une heure et demie de route jusque Tbilissi. Notre chauffeur nous accorde une pause à un restaurant juste avant d’entrer dans la capitale, car on n’a encore rien mangé. [singlepic id=126 w=150 h=240 float=right]À la gare routière de Didoubé, on nous propose immédiatement une marchroutka vers Stepantsminda, anciennement connue sous le nom de Kazbegi, pour un modeste 10 laris par personne et trois heures de route. Pendant que Xavier et moi gardons les sacs dans la marchroutka, Muriel, Claire, Augustin et Simon vont faire quelques courses alimentaires dans le bazar. Nous voilà finalement partis, sur la fameuse route militaire géorgienne, et arrivons à Stepantsminda vers 16h, à une altitude de 1740m. C’est la dernière ville avant le défilé du Darial, seul passage naturel à travers le Caucase, on n’est donc qu’à quelques kilomètres de la frontière russe, d’ailleurs la moitié des voitures qu’on voit ici sont immatriculées en Russie. La frontière est de nouveau ouverte depuis 2010, mais pas pour les Géorgiens. Il y a un paquet de backpackers, nettement plus qu’en Svanétie, ainsi que de nombreuses agences de tourisme. On en repère deux qui nous proposent guide et équipement pour l’ascension du Kazbek, et qui en plus connaissent l’anglais. Alors que Mountain Hut nous propose le tarif avantageux de 450 € pour un maximum de cinq jours avec le guide, Mountain Travel Agency nous propose un meilleur tarif pour l’équipement, à savoir 200 € pour six piolets, baudriers, paires de crampons et paire de mousquetons pour trois jours. On ne s’attendait pas à ce qu’un guide puisse suffire pour six personnes, mais s’ils le proposent c’est que ça ne doit pas être déraisonnable. Les deux agences n’ont aucun problème avec le fait qu’on fasse cette combine. La très sympathique dame de Mountain Travel Agency nous explique qu’on peut planter la tente dans le bois à 500 mètres de là. On va se faire une bonne bouffe au resto, avec vue sur le Kazbek dont le sommet se découvre, shashliks de porc au menu, puis on va dresser le camp dans le bois recommandé avec deux bonnes bouteilles de vin. Comme on nous en avait avertis, il y a eu un concert dans ce même bois en soirée, mais cela ne nous a pas empêché de dormir.

[singlepic id=135 w=150 h=240 float=left]Vendredi 14, on a rendez-vous à 8h du matin avec le guide devant l’agence Mountain Hut. On l’y retrouve, et il nous propose de monter avec son 4×4 jusqu’à l’église de la Sainte-Trinité de Gergeti (Tsminda Sameba), perchée à 2170m et qui surplombe la ville de manière spectaculaire. On se dit que grâce à ça, on va gagner un peu de temps. Au fur et à mesure que nous entamons la montée vers le refuge, le grand ciel bleu laisse s’installer un gros nuage neigeux sur le Kazbek, dont nous ne voyons maintenant plus le sommet. Claire est un peu malade mais les médicaments font de l’effet. La pente est relativement raide jusqu’à un premier col à 2950m, et est ensuite plus douce le long d’un genre de canyon jusqu’au glacier de Gergeti que nous remontons pendant un kilomètre et demi sous la neige, [singlepic id=146 w=150 h=240 float=right]sans corde ni crampons, avant de terminer sur un raidillon de cent mètres dans les cailloux jusqu’au refuge Bethlemi, ancienne station météorologique qui rappelle le fort Boyard, situé à 3653m. Comme le tarif est de 20 laris par personne par nuit à l’intérieur du refuge et de 10 laris par tente à l’extérieur, on choisit cette deuxième option. Cela ne nous empêchera pas de squatter la cuisine et un peu de nourriture laissée par des expéditions précédentes, ainsi que de prendre un petit shot de chacha dans la salle chauffée des guides. Les canalisations sont gelées, donc l’eau n’arrive pas jusqu’au refuge, mais il y a un petit réservoir de 200 litres un peu plus haut, et mieux vaut faire ses réserves le soir sous peine de devoir briser la glace du matin.

[singlepic id=149 w=150 h=240 float=left]Comme toute première nuit à une telle altitude, on a vraiment mal dormi. On ne sait pas à combien la température est descendue en dessous de zéro mais on a presque tous eu un peu froid. Au réveil samedi matin, le ciel est dégagé, au même titre que le sommet du Kazbek. Tout est plâtré par la neige qui est tombée la veille, c’est magnifique. Aujourd’hui, c’est la journée d’acclimatation. Sans replier les tentes, et avec un sac parfaitement allégé, on part vers 9-10h pour rejoindre le glacier un peu plus haut afin d’y pratiquer quelques exercices rudimentaires de manipulation de corde et d’utilisation de crampons et piolets. À 11h, les nuages sont déjà remontés et on recouvert le sommet. On est monté jusqu’environ 4100m avant de redescendre jusqu’au refuge où nous sommes de retour vers 14h. À notre grand regret, notre contact avec Pierro est assez froid, il se contente de nous emmener en montagne et de répondre à nos questions, sans même se soucier de savoir nos prénoms. [singlepic id=153 w=150 h=240 float=right]Ce n’est pas avec lui qu’on va se marrer. En arrivant au refuge, on a la très désagréable surprise de constater que la casserole et les couverts qu’on avait laissés dans la cuisine ont été volés. Heureusement, le réchaud est encore là, et on peut emprunter de la vaisselle dans la salle des guides. On occupe le reste de l’après-midi comme on peut, principalement dans la cuisine, où on enchaîne les repas. Vers 17h, des mauvaises nouvelles arrivent du sommet, un polonais s’y est cassé la jambe et est immobilisé sur la selle à 4900m. Comme ils étaient cinq, deux ont pu rester avec lui pendant que les deux autres descendaient. Pendant notre repas, la mission de sauvetage se met en place. Pierro, qui est sauveteur, nous annonce qu’il part pour le sommet ce soir et que nous partons demain matin avec un autre guide, Kya si j’ai bien compris le nom, à 5h plutôt qu’à 3h. C’est avec respect que nous regardons partir ces deux sauveteurs suréquipés en direction du sommet alors que l’obscurité tombe. Cette image contraste avec celle du guide habillé comme un vrai touriste de la montagne qu’on avait eu jusqu’à présent. Nous allons dormir vers 20h30.

[singlepic id=162 w=150 h=240 float=left]Dimanche 16 septembre, jour du sommet, on se réveille à 4h. Après un copieux petit-déjeuner de céréales, on abandonne de nouveau nos tentes et n’emportons que le strict minimum pour la longue ascension. Notre nouveau guide ne parle pas vraiment anglais, et marche particulièrement lentement au point de rendre l’ascension presque pénible pour tout le monde. Le soleil pointe son nez derrière la montagne au moment de nous encorder. Les lumières sont absolument incroyables. Nous sommes donc encordés à sept. La marche sur glacier est en pente assez douce, et un peu technique quant aux crevasses à éviter et enjamber au début. La route contourne quasiment toute la montagne par rapport au refuge, et quand, vers 9h30, à 4400m, nous apercevons un sommet, le guide nous dit que ce n’est pas le bon et qu’il nous reste encore trois bonnes heures. On commence à apercevoir l’Elbrus au loin, la plus haute montagne d’Europe du haut de ses 5642m, ainsi que le Chkhara. C’est plus ou moins à la même heure qu’on aperçoit le groupe d’italiens qui a fait le sommet ce matin, et qui redescend avec le polonais blessé. C’est au même moment que notre guide nous lâche et que Pierro prend le relais. On est sidérés… Il n’a probablement pas dormi de la nuit et nous reprend sous sa responsabilité jusqu’à un sommet de 5000m… [singlepic id=183 w=150 h=240 float=right]Vers midi, on arrive à la selle à 4900m après avoir fait une partie de la route en territoire russe. Ça y est, on est plus hauts que le Mont Blanc ! Pour notre plus grand bonheur, les nuages semblent pour une fois rester dans la vallée. Après une petite pause près de la tente jaune où ils ont passé la nuit, on attaque les 130 derniers mètres un peu plus raides jusqu’au sommet, situé à 5033m. Nous y arrivons tous les six, vers 13h. Un nouveau record pour une bonne partie du groupe ! L’altitude fait ressentir ses effets douloureux. Et Pierro a l’air complètement lessivé. On prend un max de photos, sans s’éterniser car on a encore une longue descente et que le vent risque de se lever. À 14h, après une descente prudente, on est de retour à la selle. On démonte la tente et on se répartit le matériel. À 16h, après avoir mangé un rapide pique-nique, on est de nouveau à 4200m, mais la chaleur provoque fonte de glace et de dangereux éboulements, on doit donc suivre un itinéraire qui s’écarte un maximum de la paroi et surtout ne pas traîner, selon les conseils avisés de Pierro. À 17h, on quitte le glacier, et à 18h, on est de retour au refuge. On a même eu un petit peu de brouillard pendant la dernière demi-heure. Il nous aura fallu un total de 13 heures, soit 8 heures pour la montée et 5 heures pour la descente. On est absolument épuisés. Pierro encore plus. Il se réfugie dans le bureau des guides, où nous rapportons tout le matériel qu’on a descendu de la selle. Ce soir, le refuge est rempli, est c’est un peu frustrant de ne pas avoir immédiatement de place à table pour cuisiner après une telle journée.

[singlepic id=196 w=150 h=240 float=left]Cette nuit, on a encore mieux dormi. On se réveille à 6h30 lundi matin car on doit rapporter le matériel à l’agence avant 13h afin de ne pas payer pour un jour supplémentaire. Il fait de nouveau grand soleil et le sommet est dégagé. Comme la neige a fondu, le paysage a radicalement changé en l’espace de deux jours. Rien de bien neuf dans la descente si ce n’est que la traversée finale du glacier est un peu glissante sans crampons, mais on s’en tirera tant bien que mal. Dans la descente, on tombe sur un slovaque qui nous demande directement si on est le groupe de belges. Il était tombé sur Rasto et Maria à Stepantsminda qui lui avaient parlé de nous. Passé 11h30, alors que les nuages commencent à recouvrir le sommet du Kazbek, on arrive à l’église Tsminda Sameba, qu’on visite rapidement. De retour à l’agence, on rend tout le matériel, et on se rend compte d’un gros malentendu avec le guide, il nous demandait en fait 10 € par personne pour le trajet en 4×4 sur la piste en fort mauvais état jusqu’à l’église. On trouve ça vraiment excessif, mais c’est ce qui avait été convenu, et il a l’air particulièrement mal à l’aise de cette situation. [singlepic id=201 w=150 h=240 float=right]On ne sait pas encore vraiment ce qu’on va faire des 2-3 derniers jours, mais on imagine aller faire un tour du côté de Juta dans la vallée de Sno. Pierro nous dit qu’il peut nous en déposer pas loin en rentrant vers Tbilissi. On se donne une heure pour décider, tout en allant faire des courses, pendant que Pierro a d’autres trucs à faire. On va finalement l’attendre plus de deux heures sans qu’il ne donne signe de vie, alors on finit par laisser tomber. On fait un petit tour dans la ville avant de tomber sur Vassili et son taxi Lada Niva à la gare routière. Il nous propose un aller-retour sur Juta demain pour la somme de 80 laris en tout. On ne s’attendait pas à moins cher, et puis il a l’air marrant. Il a une plaque russe, et explique qu’il est géorgien mais qu’il a deux passeports, car il est un peu mafieux : « Vassili mafiosi ! ». Il nous embarque pour nous montrer sa maison et les terrains de camping qu’on connaît déjà, « Vassili Schumacher ! ». Il nous redépose et nous donne rendez-vous demain avec sa Mitsubishi Delica. On va enfin se prendre le shashlik tant attendu, puis en se dirigeant vers le bois du premier soir où nous comptons replanter les tentes, on est suivi par un gigantesque chien blanc qui s’est donné pour mission de nous protéger pendant la nuit. Nous le baptisons Kazbegi. Quelques chansons autour d’un feu avec un peu de vodka, et on va dormir. À part quelques aboiements, la nuit fut bonne. Nous profitons enfin d’une nuit à température douce.

[singlepic id=213 w=150 h=240 float=left]Mardi matin, Vassili nous a repéré dans le bois et nous confirme le rendez-vous ici-même un peu plus tard. Les tentes repliées, on l’attend. Sa Mitsubishi Delica tardant à revenir d’un aller-retour avec des touristes jusqu’à l’église, il nous offre le thé chez lui. À midi, soit avec deux heures de retard, nous voilà partis dans le monospace 4×4. L’embouchure de la vallée de Sno est à cinq kilomètres de là, et le trajet jusque Juta dure trois quarts d’heure. C’est une belle journée ensoleillée qui nous est offerte dans cette charmante vallée. Comme on a laissé nos sacs chez Vassili, nous voyageons léger. Après un petit raidillon à la sortie du petit village lui-même situé à plus de 2100m, on arrive dans la verte vallée qui monte en pente douce jusqu’au Chaukhi, proéminente montagne de roche s’élevant à 3842m. Le Lonely Planet nous estime 1h30 de marche jusqu’à son pied, mais avec nos multiples arrêts photos, baignades, pique-niques et séances de bronzage, on en aura presque mis quatre. [singlepic id=223 w=150 h=240 float=right]Soleil aidant, cette promenade verdoyante le long du torrent est pittoresque, cela explique probablement le nombre important de touristes qu’on y croise. Chacun va un peu à son rythme et va voir ce qu’il désire. Comme on a rendez-vous à six heures en bas avec le chauffeur, on doit rebrousser chemin vers 16h50 plutôt que de continuer jusqu’au col de Chaukhi, trek qui nous avait été conseillé. C’est avec un peu de regret qu’on quitte cette magnifique vallée si propice au bivouac. En arrivant à hauteur de la ligne des arbres, les couleurs ne trompent pas : l’automne est à la porte. Nous arrivons à Juta avec 10 minutes d’avance mais le chauffeur est déjà là, on rentre donc chez Vassili, on récupère nos affaires, ainsi que notre toutou Kazbegi sur la place centrale de Stepantsminda, et on va se faire un troisième bivouac au même endroit, et après avoir mangé notre dernier repas composé de nouilles, on termine la vodka autour du feu.

[singlepic id=210 w=150 h=240 float=left]Mercredi 19, on s’autorise une grasse matinée, d’autant que la température est vraiment agréable. On fait nos adieux au Kazbek, à Kazbegi, et à 13h30, la marchroutka démarre en direction de Tbilissi. On se plait à se dire que depuis le 13 septembre, jour de notre arrivée à Stepantsminda, la seule journée où les nuages n’ont pas recouvert le Kazbek en fin de matinée fut celle de notre ascension. Le chauffeur est particulièrement rapide. On repasse le col de la Croix à 2395m, et en arrivant sur l’autoroute à l’entrée de Tbilissi après 2h30 de trajet, il ralentit à cause des radars. À la gare routière de Didoubé, plusieurs personnes nous aident à trouver le bus vers l’aéroport, dont un géorgien qui parle français. On reprend un métro jusqu’à la gare ferroviaire, on repère le bus en question, et on se prend un pique-nique tardif. Après avoir traîné un peu, vers 18h, on va prendre le bus 37 en direction de l’aéroport. Le trajet coûte 0,5 lari par personne mais on n’a jamais trop pigé comment payer car il utilise le même système de carte à recharger que pour le métro, donc on a fraudé. De toute façon, on est de nouveau complètement serrés, et le trajet qui était censé durer 45 minutes en a plutôt duré 1h30, si mes souvenirs sont bons. Comme nos deux avions sont en pleine nuit, à cinq minutes d’intervalle vers 4h45, on déroule à nouveau les matelas sur notre fausse pelouse attitrée. 4h semble être l’heure de pointe à l’aéroport de Tbilissi qui, vide à notre arrivée, se remplit tout au long de la nuit avec des vols annoncés de plus en plus régulièrement. Une fois l’heure venue, nous repassons la douane et faisons bon vol, avec, tout comme à l’aller une petite course à Tallinn pour ne pas rater le dernier rappel : nous sommes à nouveau les derniers à embarquer. À notre grande surprise, le temps en arrivant en Belgique à 9h du matin est tout à fait correct.

[singlepic id=224 w=150 h=240 float=right]Pour conclure, on peut dire que ce voyage a été une franche réussite du début à la fin, à découvrir un pays et son immense variété de paysages, allant des alpages aux sommets enneigés, de la mer au désert ; que mis à part l’un ou l’autre malade et l’une ou l’autre perte, tout s’est plutôt trop bien passé, en particulier au niveau des conditions météo ; que l’ambiance a été au beau fixe dans toutes les situations… Avant tri, j’avais un total de 1064 photos, comme Simon et Augustin qui devaient en avoir presque autant que moi. Un voyage en Géorgie est facile à organiser, relativement bon marché et les gens sont tout à fait chaleureux. Bref, le Grand Caucase est à recommander !