Randonnée en Norvège du Clan de Bossut
1er jour: des début laborieux
Ayant sous estimé cette région montagneuse, nous revoyons notre itinéraire afin de ne pas abuser de nos ressources le tout premier jour. Sous un soleil tenace et puissant, les pauses se multiplient. En bas, le beau lac de Ringedalvasnet semble être insensible à notre souffrance. Mais une souffrance soulagée le soir à l’arrivée au premier refuge DNT.
Tels des petits Tamia que nous avons croisés sur notre chemin, nous guettons les alentours, observons l’intérieur du refuge remplies de petites gâteries. Payantes malheureusement.
Nous sommes enfin heureux de pouvoir profiter calmement, après s’être rempli la pense et monté les tentes, de ce magnifique coucher de soleil. Après digestion du carbonara, une nuit bien méritée s’impose à tous.
2ieme jour: Cols, neige, paysages somptueux
C’est un premier levé mais également un premier petit déj’ assez rustique et pauvre en quantités. Il faut si faire à ne pas trop manger même si la tentation est grande de lester du poids de nos sacs énormes. En t-shirts-short, nous reprenons la route. Nous sommes habillés légers mais pourtant nous traversons des glaciers, des étendues de neiges glacés, des chemins tantôt verdoyants, tantôt ensevelis sous la glace. Malgré la difficulté des cols à gravirent, des chemins rocailleux, des torrents à traverser, des pentes glissantes et escarpées, nous assistons tous, ému, à la beauté d’un spectacle de fonte de glaciers éternels et de lacs qui se partagent cette eau si pure mais si froides. Cette eau est une ressource idéale pour notre bonne condition de marche. Nous n’hésitons pas à trempé la casquette pour plus de fraicheur.
Après 4 km de montées entre les énormes blocs de pierre, nous grignotons quelques barres de céréales et un petit morceau de chocolat comme repas de midi. C’est à ce moment que l’on pense aux bons repas consistants que maman nous prépare bien au chaud dans ses fourneaux.
Pour parler de la route, les sentiers sont bien indiqués par une lettre T en rouge et il faut être vraiment distrait pour les manquer. Tous sous le charme du pays des lacs, nous poursuivons la route…
Il est 19h et les crampes se font ressentir aux chevilles ainsi qu’au bas du dos. Tous d’accord pour s’arrêter, nous plantons les sardines et préparons les réchauds pour le souper. Ayant beaucoup monter aujourd’hui, il est évident de camper en haut d’un sommet. Pendant plus d’une heure, nous restons silencieux face à la beauté que le soleil de Norvège nous offre pour la deuxième fois. Le terme aventure prend ici tous son sens.
Crevés et exténués, nous nous endormons dans les bras de Morphée après un bon couscous.
3ieme jour: rivière infranchissable, bottine à l’eau
Réveil difficile, nous replions le matos, lavons les casseroles dans l’eau glaciale et prenons notre bol de crunchy pour nous encourager à notre 3ème étape. Au loin, dominant tout l’Hardangervidda, le prestigieux Harteigen guide les randonneurs égarés.
Aujourd’hui, c’est une petite trotte mais les rivières sont nombreuses et parfois infranchissables à pied. Les nuages se font de plus en plus menaçant, la température baisse et nous sommes face à ce torrent furieux. Nous sommes désemparés. Il n’y a aucun moyen de traverser la rivière avec les sacs à dos. Equipés comme Roald Amundsen, nous tendons alors une corde pour faire passer nos sacs au dessus du torrent et les faire parvenir de l’autre côté grâce à l’idée ingénieuse d’un de nos camarades. Un par un nous les faisons coulisser au dessus du torrent plus que violent. Maladroit et ayant deux mains gauches, l’un de nous lance sans faire exprès une chaussure à l’eau. Ce dernier voulant l’envoyer de l’autre côté, à manquer son geste.
Le courant emportant rapidement la chaussure, il faut réagir vite. Directement le coupable court et se jette à l’eau dans l’espoir de pouvoir rattraper la chaussure un peu plus loin. Malheureusement, la chaussure semble s’être coincé en plein milieu de la rivière et est inatteignable depuis la rive. L’eau est glaciale. Nous supposons que, découlant des glaces, elle se situe entre 3 et 5 degré. De plus, le courant y est très fort. Il n’est dès lors pas aisé de s’y jeter, et encore moins d’y nager. Nous décidons alors d’attacher le maladroit à une corde et de le maintenir à deux afin d’éviter tout risque potentiel dans l’eau. Celui-ci, une fois prêt, se jette à l’eau, nage quelques minutes, et atteint enfin la bottine toujours bloquée. Il rejoint ensuite la rive aussi vite que possible, tiré par ses deux camarades, avec son trésor. Il sort de l’eau frigorifié et tente par tous les moyens possibles de se réchauffer vite.
Après avoir passés tous les sacs sur l’autre rive, il reste plus qu’à passer de l’autre côté pour la moitié de l’équipe. Nous avons perdu beaucoup de temps avec cette traversée. En outre, le temps s’est fortement dégradé et nous devons encore subir quelques montées de cols avant de pouvoir bénéficier d’un repas bien mérité. C’est enfin au loin, que nous apercevons le refuge de Torehyten. Trempés jusqu’à l’os, nous combattons le vent et la pluie battante et redoublons d’attention dans les chemins aux pentes souvent abruptes et dans les ascensions ressemblant parfois plus à de l’escalade qu’à de la randonnée. Parfois nous avons l’impression de nous retrouvons derrière ces feuilletons d’aventure, genre Ushuaïa nature, tellement le contraste est énorme entre notre vie de confort que nous vivons au quotidien et ce périple qui demande plus que de l’énergie.
Il est 18h lorsque nous enlevons nos gaudasses trempées sur le seuil d’entrée du refuge. Un garde à l’anglais peu compréhensible nous fait savoir les règles du refuge et nous demande à tous de signer le fameux registre de la DNT. Le poêle dans le salon au 18 lits tombe à point car il prend vite la fonction de séchoir au lieu de radiateur. Nous profitons chacun du temps libre devant nous pour faire ce que bon nous semble. Certains partent pêcher, d’autres se reposent, tandis que le reste prépare la cuisine ou coupe le saucisson.
Après avoir taper la carte autour d’une bonne tasse de thé digestive, et après avoir bien rigoler sur l’épisode de la bottine, les premiers ronflements se font vite entendre.
4ieme jour Accident, hélicoptère, mental
Quand nous dormons en refuge, le départ se fait plus lentement, la douceur des draps et le confort des matelas prennent une importance capitale en matière de luxe.
Mais à 10h, il est temps de plier bagage et de donner un dernier coup de propre dans le chalet. Plein d’entrain, nous mangeons les premiers kilomètres avec plus de facilités qu’au premier jours.
Les paysages changent d’une rapidité déconcertante, tantôt des étendues de neiges et de roches, maintenant des prairies divisées par des méandres à perte de vue.
Malheureusement, le danger reste constant et il faut être constamment attentif où l’on met les pieds. Durant les premiers jours , il fallait faire attention aux ponts de neiges et aux crevasses. Plusieurs fois, quelques uns ont failli passé à travers la neige ou glisser dans un torrent en remplissant leur gourde. Maintenant, ce sont les petits rochers pointues sur les chemins qui créent le danger.
Par malchance, l’un d’entre nous s’en est prit un méchamment et son voyage est évidemment compromis. La chute est assez importante mais heureusement il n’est atteint qu’à la cheville. Ne pouvant plus continuer, la cheville gonflée et ne sachant pas ce qu’il a, nous décidons d’appeler les secours.
Malgré un téléphone satellite dans notre matos, nous ne parvenons pas à joindre les secours. Nous décidons alors à deux de monter encore plus haut dans l’espoir de mieux capter le “réseau”. Rien n’y fait, la malchance nous poursuit. C’est alors que l’un de nous s’aperçois que nous avons deux barrettes de réseau GSM (réseau qui depuis le premier jour nous avait fait défaut) à l’endroit où nous avons installés notre camp de fortune en attendant les secours. Grace à ce petit miracle, la communication fut établie entre le centre de secours et notre position. Mais il nous a fallu tout de même attendre quatre bonnes heures pour que l’on aperçoivent enfin le fameux hélico jaune de secours.
Très pro, les sauveteurs diagnostiquent notre ami et ils concluent une fracture de la cheville. Aussitôt rapatrier, nous lui faisons signe de la main pour lui dire à dans quelques jours, car il nous attendra à l’arrivée. Un peu stresser par la perte de temps (il est 17h quand les secours partent), nous mettons les bouchers doubles pour rattraper les kilomètres. Nous décidons de revoir l’itinéraire et de couper au plus court pour retrouver aussi vite que possible notre blessé à Kinsarvik. Nous empruntons alors des raccourcis et effectuons quelques ATT. Grave erreur! Nous nous retrouvons dans un nuage de moustique plus qu’affamé qu’une horde de vampires. Coriaces et téméraires face à nos anti-moustiques et nos filets sur la tête, Ils nous dévorent tous. Nos piqures se compteront le soir pour certains à plus de 50. Ce raccourci fut à mon avis l’expérience la plus dure au niveau mental, hormis les moustiques, nous marchons dans des marécages et la pluie ne cesse de tomber sur nos KW. Nous frappons à la porte de certains “refuges privés”, habités par de merveilleuses créatures afin de retrouver notre chemin. Mais même leur beauté et leur indication ne nous permettent de retrouver le chemin directement. Abattus et sur les rotules, le silence se fait ressentir dans la file. Seuls les ailes de ces infernaux moustiques nous titillent les oreilles. Chacun puisait dans ses ressources. Ne pouvant plus continuer par la fatigue et par le temps, nous dormons sous tentes directement en face de vielles bergeries abandonnées.
Sans conteste, ce jour fut le plus long et le plus difficile de tout le trek. C’est ce jour là qu’on a véritablement compris le sens du mot “Aventure”.
5ieme jour: on écourte le trek, direction Kinsarvik
Après une nuit difficile, le réveil est plutôt tendu et les nerfs sont à vifs. Nous continuons notre route et essayons de trouver le chemin le plus court pour parvenir au plus vite à Kinsarvik afin de rejoindre notre blessé. Après avoir mit de la pommade sur nos multiples piqures, nous laçons nos chaussures pour la cinquième étape.
Cette journée est marquée par une marche plus individuelle, chacun se retrouve avec lui-même, les pauses sont évidemment plus courtes vu la route qu’il nous reste. Nous commençons tout doucement à descendre en altitude. Les truites nous saluent de leur bassin et les rares randonneurs d’un geste de la main et d’un « HI» assez nordique.
Des paysages plus étranges, mais plus beau les uns que les autres nous font face. Des déserts de mousses et de rochers, des prairies vallonnées et des rivières aux pierres rougeâtres.
Le plus beau moment de la journée est sans nul doute l’arrivée dans la vallée du refuge. L’étendue est telle que l’on a le souffle coupé. Au loin, une petite maison rouge fait mine de nous indiquer le chemin. Suivant le sentier et traversant les ponts au dessus des cascades infernales. Nous faisons nez à nez avec marguerite, la première vache de notre voyage. Il s’avère que le propriétaire du refuge est indépendant et il vit toute l’année au beau milieu de cette gigantesque cuvette, dans ce magnifique refuge à la couleur bordeaux.
Après avoir soigné nos petits bobos et manger un bon souper, nous découvrons les alentours et très gentiment le propriétaire nous propose d’utiliser sa «douche en plein air».
Le système étant de se verser une cruche d’eau tiède au milieu d’une petite tourelle de pierre qui fait office de rideau de douche. Le concept est rustique, mais quel bonheur de se sentir propre après ces journées de marche intense. Ce petit moment de luxe en entraînant un autre, et la fatigue se faisant sentir, nous hésitons à rester là pour la nuit. Mais, il nous faut continuer. Toutefois, apprenant que notre blessé nous attend dans un hôtel 3 étoiles, nous décidons alors de suivre son exemple. Ce soir, nou dormirons au refuge.
Le soir, le refuge est plein de gens, vu que nous nous rapprochons des fjords, les randonneurs et les pêcheurs se font plus nombreux et l’ambiance est évidemment au rendez-vous. Des échanges de chants aux sons des guitares se font entre norvégiens et bon belges. Même si la bière est hors de prix, on ne manque pas de passer une très agréable et conviviale soirée dans le salon du refuge. Dehors, le proprio ainsi que des amis à lui n’hésitent pas à profiter du jaccuzzi,sans rien pour se couvrir évidemment. Nous sommes en pays Scandinave, gardons les traditions.
Il est temps d’aller se coucher, bonne nuit.
6ieme jour: Arrivée à Kinsarvik et retrouvailles
Plus le temps de faire grâce matinée, la route est encore très longue pour rejoindre le village de Kinsarvik, l’arrivée phare de notre aventure où notre camarade à la cheville endommagée nous attend de pied ferme.
La descente commence et nous quittons petit à petit le plateau hostile. On y laisse évidemment de la souffrance mais on garde un souvenir tellement unique et rempli de sensations hors du commun. Pour ce qui est de la descente, elle n’est pas si simple et si courte que cela. Les genoux en prennent pour leur grade et il faut faire attention à ne pas glisser sur les pierres mouillées. Mais le spectacle des 3 cascades gigantesques nous remplissent les yeux. Ces dernières nous montre le chemin vers les Fjords et c’est en vain que nous posons le pied sur du macadam. Plus que 3 Km avant le centre du village…
Emus mais à la fois heureux d’avoir vécu cela ensemble. Nous nous sommes soutenus dans les moments difficiles, nous avons ris, nous avons pleurés, mais on s’est surtout surpassé et on a su se prouver à soi-même que quand on veut, on peut.
On retient surtout qu’il ne faut jamais sous estimé la nature, celle-ci aura toujours le denier mot. Cette aventure nous permet aussi de se rendre compte de l’importance de la respecter et de l’admirer telle qu’elle est. Pour nous tous, c’était notre premier trek en autonomie complète. Nous en garderons tous un souvenir mémorable !
Amateur(s) de grandes sensations et des paysages nordiques, ce voyage est fait pour vous. N’oublier pas un bon matériel mais surtout un bon état d’esprit.