Traversée de Abisko à Nikkaluokta

Une semaine de raquettes sur la Kungsleden (Kingstrail, voie royale), d’Abisko à Nikkaluokta, c’était notre programme initial. C’était avant que Dom nous conseille de troquer ces raquettes contre des skis de randonnée nordique, ce qu’aucun de nous n’avions déjà fait, mais ce que nous avons accepté.
Armés de nos skis et de nos peaux de phoques, on a donc pris la direction de la Laponie suédoise pour 5 jours de skis (dernière semaine de mars) sur cet itinéraire d’un peu plus d’une centaine de kilomètres. La Laponie occidentale est une région que deux d’entre nous avions déjà pu parcourir en été (du côté norvégien), et la refaire en hiver était un souhait depuis pas mal de temps. C’était aussi l’occasion de faire une bonne pause au milieu de nos boulots et mémoires respectifs!
Après un vol Bruxelles-Kiruna avec escale à Stockholm, une nuit à Kiruna et 1h de train jusqu’à Abisko Turiststation, nous voilà partis pour plusieurs jours sacs au dos (d’une bonne vingtaine de kilos chacuns), avec toute la nourriture nécessaire (muesli et prince starts, parovitas et de quoi les décorer, barres de céréales, lyophilisés, thés, soupes, etc), vêtements chauds, matériel de camping (réchaud, tente, etc.), même si nous prévoyions de passer la majorité des nuits en refuge. Nous sommes également équipés d’une bonne carte du coin et de notre carte de membre STF (l’Office du tourisme suédois), achetés à Abisko. La carte de membre nous permettra d’avoir de bonnes réductions sur le prix du logement en refuge.
Les premiers pas, et même les premiers jours de ski de rando, pour celui qui n’en a jamais fait, sont plutôt sportifs, les chutes sont nombreuses, même à l’arrêt (eh oui) ou au détour d’une légère pente. Mais l’expérience arrive avec les jours, même si les plaques de verglas ne pardonnent jamais! On colle les peaux de phoque pour les longues montées, et on les range dans le sac pour dévaler plus rapidement les descentes !
L’itinéraire est planté de poteaux tous les 30 mètres qui permettent de ne jamais le perdre, même en cas de mauvaise visibilité. Même lors d’une journée de bonne tempête, nous avons toujours pu avancer, s’arrêtant parfois quelques instants à un poteau avant de trouver le suivant entre deux bourrasques de poudreuse.
Concernant la météo justement, nous avons eu pas mal de chance. C’était un choix apparemment judicieux de choisir une période de l’année avec une assez longue journée, mais avec encore assez de neige. Cette dernière semaine de mars était d’ailleurs, à en voir le nombre de personne dans les refuges et à en croire les gardiens de refuge, une période de pic d’affluence sur la voie royale. On a pu profiter de bonnes journées, le soleil se levant vers 5h et se couchant vers 20h, d’un temps froid (entre -5 et -15 généralement) mais ensoleillé (l’idéal quoi), tout à fait supportable et même chaud, en plein effort, et sous les nombreuses couches de mérino, polar, coupe-vents, etc. Le froid nous rattrape cependant vite à l’arrêt, le climat lapon se rappelle toujours à notre bon souvenir. Les derniers jours ont été plus couverts, voire carrément tempétueux, mais comme on l’a dit, cela ne nous a jamais empêché d’avancer, au contraire même, les coups de vent nous poussant dans le dos. Dans l’autre sens, ça aurait toutefois été une autre affaire…
La Kungsleden, entre Abisko et Nikkaluokta, est rythmée par la présence de refuge tous les 15-20 km, correspondant à une journée de ski de rando. Ceux-ci sont habités par un gardien, et souvent très bien équipés: outre des dortoirs assez confortables chauffés au bois, des cuisines basiques mais bien suffisantes, presque tous ont un petit magasin de vivres de base, et la plupart disposent aussi d’un sauna, toujours bien agréable après une journée dans le froid et ils permettent de se laver un minimum. On y rencontre pas mal d’autres skieurs ou raquetteurs, et on y participe au fonctionnement de l’endroit en allant couper du bois et chercher l’eau dans le lac tout proche. Il faut compter 305/270 SEK la nuit, ou 135 /100 SEK si on décide de profiter des infrastructures sans y loger, en plantant la tente à côté. La différence de 35 SEK dépend de la présence ou non d’un sauna dans le refuge.
Oui, car les nuits sous tente sont possibles, elles permettent d’économiser le prix du refuge ou de se créer des étapes sur mesure, ce qui est parfois bien, entre des étapes trop courtes (14,5km) et d’autres un peu longues (22-23km). Mais il faut avouer que profiter du refuge, rien que pour sécher ses affaires et reprendre des forces, devient vite un luxe qu’on a du mal à se refuser!
Les paysages de la région sont superbes, dans ces montagnes qui entourent le massif du Kebnekaise, plus haut sommet de Suède (2106 m d’altitude). On passe dans de longs et très larges plateaux, des vallées entre deux montages abruptes, des flancs de collines, complètement dénués d’arbres. Le vent y souffle bien et la neige est haute: dès qu’on enlève les skis, on s’enfonce facilement malgré la couche de neige bien dure qui recouvre tout. La faune se fait également assez discrète, on a surpris tout au plus 3-4 élans assez près des lieux habités, et un renard rodant la nuit tombée autour de la tente. Les soirs clairs, on espère observer une aurore boréale; celles-ci ne nous ont malheureusement pas gâtées, malgré le ciel dégagé : on n’en a observé qu’une seule fois, et encore, elle était plutôt faiblarde.
On a terminé ce périple par la très fréquentée station du Kebnekaise, avant de faire les derniers 20km vers Nikkaluokta dans la vallée, sur les pistes de motoneige. De là, une grosse heure de bus nous ramena à Kiruna, pour une dernière soirée dans la ville minière, et un bon hamburger-frites au Bishop Arms, le pub de la ville ! Le lendemain, retour à Bruxelles par Stockholm de nouveau, la tête déjà pleine de souvenirs !
Bref, la Kungsleden est un bel itinéraire à conseiller à d’autres ! Sportif, même si tout à fait accessible pour les néophytes en ski de rando comme nous, il offre un bon bol d’air bien frais et de paysages infinis. Cette période semble être la meilleure pour la parcourir et, malgré certains endroits plus difficiles à maîtriser en ski de rando, c’est un moyen de transport plus rapide et sans doute moins fatigant que la raquette. Prévoir 6 ou 7 jours pour être à l’aise (nous l’avons faite en 5 jours, en combinant plusieurs étapes).
Tanguy, Oli et Léo
PS : les photos vont suivre prochainement !