Passeport Expé en Islande

ISLANDE 2015

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L’Islande c’est le pays qui fascine tout le monde depuis leur tendre enfance. Et bien pas moi, j’y avais jamais pensé moi à ce tas de cailloux perché dans l’océan Atlantique. Enfin jusqu’au jour où, on a eu cette réunion Passeport Expé. Chacun devait donner son avis quant à la destination de l’expé de l’été et là, je ne sais comment, le mot est sorti de ma bouche : « Islande ». Vous allez probablement dire que je suis impulsif, jeune et con. Et bien j’assume, je suis impulsif, jeune et con et c’est tout ça qui m’a poussé à partir avec une bande de jeunes que je ne connaissais pas, dans le fin fond de lapampa islandaise.  Car oui, si nous étions tout un groupe à décider c’est finalement cette destination que je venais de proposer, qui s’est imposée… Ici se trouve peut-être toute la complexité et finalement la richesse de ce raid.

Pendant près de quatre mois, je me suis retrouvé de facto l’organisateur de  cette expé. C’est que pour moi, ce sera le grand voyage de ces très longues vacances de fin de rhéto. Je voulais donc faire tout, pour que ce soit une réussite. Pourtant, plus la date du départ approchait, plus une certaine peur me tenaillait le ventre. C’est que je me sentais un peu seul face à tous ces trucs à organiser, ces contacts à prendre, …. Est-ce que j’avais vraiment envie de passer dix jours de mes super vacances avec des types que je n’avais vu qu’une fois à la réunion du choix de la destination ?  Difficile de faire demi-tour, autant y aller à fond. Je ne le regretterai jamais.

 

Seulement trois petites heures de vol nous séparaient du froid polaire islandais. Une fois arrivé, nous devions attendre cinq heures dans l’aéroport en attendant notre bus. J’ai passé ce temps avec Félix que je n’avais plus vu depuis une année. Je peux vous dire qu’en cinq heures, nous avons largement rattrapé le silence de l’année écoulée ! La complicité qui s’installe si rapidement entre nous est magique.

Let’s go, nous sortons de l’aéroport pour prendre le bus et un vent glacial me fouette le visage. Je me retourne vers Félix et d’un regard nous avions compris que ce raid allait être un vrai défi pour nous tous.

Nous démarrons notre trek en autonomie du petit village de Leirubakki. Notre groupe de 9 jeunes assoiffés d’Aventure ne pouvait plus attendre une minute de plus. Nous commençons notre périple par une longue journée de marche, le long d’une route rectiligne qui semblait interminable. Ca commençait mal, en plus de cela, nous livrions une lutte acharnée contre des essaims de mouches. Pour voir le bon côté de cette journée (parce qu’il y en a toujours un), c’est qu’à chaque fois qu’un camion passait sur la route il nous accordait un moment de répit dans notre combat. C’est comme si la société était là pour nous rappeler qu’on aurait toujours besoin d’elle pour avancer. Cette journée n’a fait qu’accroitre notre velléité pour entrer dans le vif du sujet et sortir des sentiers battus. J’en ai profité pour faire la connaissance d’Augustin, un gars vraiment génial. Je me suis tout de suite bien entendu avec lui et nous avons passé cette première journée à rire malgré son coté dramatique. Et voilà, vous avez devant vous les trois mousquetaires, le trio infernal de l’expé !

 

Les « bonjours » impersonnels de la part de tous les autres marcheurs que nous croisons défilent autant que les kilomètres. C’est à ce moment là que nous faisons la rencontre d’un couple génial : deux écossais d’un âge certain ayant le sens des vraies valeurs dans une société dans laquelle ce mot est bien trop souvent bafoué. Tout le groupe se prend tout de suite d’affection pour eux. Pourtant ce même soir, un nouveau sentiment me traverse. Je suis agacé, agacé par certains membres, nonchalants, du groupe. Vous voyez sûrement ce que je veux dire, toujours les mêmes qui font labouffe, montent les tentes, prennent des initiatives, … Il va falloir qu’on crève l’abcès à un moment donné mais comment ?

Ce soir là j’ai fait une autre rencontre. Félix et moi allons parler au ranger (gardienne) du refuge pour se renseigner sur la météo, notre itinéraire, … On entre dans ce petit container où la température avoisinait les 25 degrés quand il en faisait 0 dehors. Je croise alors le regard de sa fille, un regard innocent, plein de joie qui me transperce de part en part et me rebooste ! Nous éternisons notre conversation avec la ranger afin de prolonger ce moment de douceur réchauffée par un regard brulant.

 

Aujourd’hui, première rivière à traverser. Cette expérience s’est avérée très révélatrice de nos personnalités : nos deux accompagnateurs, parfaits dans leur rôle, les égoïstes, les altruistes, les fonceurs. Chacun de ces moments me rapproche un peu plus de Félix, d’Augustin et maintenant des accompagnateurs avec lesquelles j’ai été un peu prudent les premiers jours. Les quatre autres ont l’air de bien s’amuser mais nous ne nous parlons pas beaucoup. Cette ambiance de clan commence à peser sur le moral des troupes. Tout le monde l’a remarqué, pourtant personne n’a le courage de casser la glace, personne excepté Augustin. Ce gars à une capacité d’adaptation incroyable. Il sera alors le tampon entre chaque membre du groupe essayant d’apaiser les tensions, toujours de manière subtile.

Chaque jour, nous revoyons notre couple d’écossais et une réelle relation tacite naît entre eux et le groupe mais particulièrement entre eux et Rodolphe. A chaque rencontre je remarque les sourires échangés avec Rod. Un jour il retourne leur parler et revient le sourire aux lèvres. « Les gars, les écossais suivent le même itinéraire que nous avec le même objectif ! » Cette nouvelle n’a fait qu’accroître le sentiment d’admiration envers euxmais a aussi fait naître une certaine compétition.

 

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Les paysages continuent à se bousculer devant mes yeux qui se troublent parfois. Je pense énormément à mon pote Arthur resté en Belgique au chevet de sa mère, Sonia, en phase terminale d’un cancer. Chacune de mes pensées pour eux m’émeuvent beaucoup. Je veux rentrer ! Je veux être là près de lui mais impossible… Étonnamment cette tristesse me rend plus fort. C’est une vraie source de motivation. Je trouve du réconfort au près de Félix qui ne dit rien et m’écoute. C’est exactement ce dont j’avais besoin.

Notre route continue, toujours plus époustouflante. Le groupe commence à faiblir, certains se plaignent d’entorses, d’autres de sacs trop lourds, … Après le moral, le physique me fait défaut. Il nous reste une journée de marche, une ascension de col enneigé avec plus de huit heures de marche sur neige. Le groupe est partagé : Est-ce vraiment raisonnable d’y aller ? Voilà enfin la confrontation de l’expé, le moment clef du raid. Il y a des gueulantes, des cris, quelques larmes. Toute la pression de sept jours sans communication mais surtout de quatre mois, a fini par être insupportable. Je règle mes comptes, je leur jette ma vérité à la figure et je les force à en faire autant. Après deux heures de discussions intenses. Nous nous regardons enfin tous droits dans les yeux Maintenant on est vraiment près à profiter  de cette Expé, ensemble.

Nous passons le jour suivant à reposer nos corps meurtris par cette longue marche. Je ne peux m’empêcher de repenser aux Ecossais partis à cinq heures du matin pour avaler cette dernière étape… Une belle leçon de sagesse.

 

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Nous prenons le bus jusque Reykjavik. Nous passerons deux journées à visiter cette ville de long en large. C’est là que je rencontre Gauthier, depuis neuf jours je ne lui ai pas décroché un mot. Je peux vous dire qu’en deux heures on s’est rapproché bien plus qu’on ne pourrait le faire en deux semaines dans la « vraie » vie. Pourquoi avoir attendu si longtemps ? Qu’est-ce que je peux être con et têtu parfois …

Un tout grand merci à tout le groupe sans qui cette expé n’aurait pas été la même et à Capexpé, en tout particulier Dom, pour tout le matos !

Ce voyage se termine en apothéose avec un vrai groupe de potes, des étoiles plein les yeux !  Le vrai bonheur ne serait-il atteignable que lorsqu’il est partagé ?

Pour Sonia et Arthur.

 

Pierre-Yves Victor

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