Récit de diverses sorties « escalade » en Belgique

Qui a dit que cet été était ensoleillé et chaud?

IMG_0367Ce vendredi j’ai retouvé Augustin  pour une journée découverte de l’escalade en falaise à Freyr. Augustin c’est le frère de Greg, l’inventeur du tour de Belgique de la grimpe à pied. Dur, dur à assumer….

Bon grimpeur de salle il veut apprendre à grimper en falaise et m’a donc relancé. Il m’avoue n’avoir pas dormi la veille … Est-ce la peur du Dom ou de la falaise? Quoiqu’il en soit son train a du retard … le ciel se couvre… Dom averti du retard du train est a son tour  en retard … poirotter devant la gare … cela commence bien …

Une fois à Freyr arrive la deuxième angoisse pour Augustin: “mais il n’y a pas une voiture sur le parking…” C’est que la météo n’est pas excellente …

“Comme premier objectif nous ferons le grand classique des 5 ânes pour éviter les traversées style hypothénuse sour la pluie”, nous dit le vieux connaisseur des lieux.

En dernière minute avant de partir en tête,  Dom sort tout de même son anorak: “on ne sait jamais”…  Cinq minutes plus tard, il pleuvait des cordes. “Continuons jusqu’au relais on verra après”….
“C’est vraiment intéressant l’escalade sous la pluie, en fait”, se disait Dom, mais bon … “je vais peut-être mettre un coinceur  pour passer le crux là et le dulfer avant la réta” ….

Augustin se lance et, chance pour lui, la pluie s’arête, le rocher reste humide, mais Dom assure sec. Cela passe, même plutôt bien à vrai dire. Augustin a le sourire … moi aussi.

Au relais Dom prépare le rappel mais Augustin s’accroche, insatiable : “on n’attenderait pas que cela sèche …” Aurait-il vue la vidéo du grand frère au Maroc?
Et il a raison le mec. Le soleil revient et sèche la parois en 15 minutes. Repartons. Ah, ce magnifique pilier, mille fois fait et refait! Là, un brin humide, il sent simplement bon ! C’est un grand moment où les doigts, les mains, les coudes et les jambes entre en fusion avec la roche luisante…  Cela vaut bien un ice tea au Cham pour celler la complicité naissante.

Anticipant mieux la pluie cette fois, nous repartons pour la “corde magique” au Louis Philippe, connue pour rester à l’abris des gouttes. La “corde magique” ? C’est pas la première voie que tu as faite en tête, Dom? Cela a l’air dur avec un première longueur en 6a+ dans le topo mais c’est du vieux 6a+ Freyr tu sais?  Et le premier piton il est où? … On va peut-être commencer par le “Fakir”, un 6a tout court, Freyr ou pas….

Putain c’est que dur ce truc ce … F… , où sont mes coinceurs …. et Augustin, assure moi sec tu veux bien,  Augustin ?  La corde se tend, c’est qu’il suit vraiment ce petit ket. Le courant passe. Voilà même qu’il encourage: “Vas-y Dom”. J’y vais …. blocage du bras droit, lancé du bras gauche … yes, yes, cela tient … YES!

Descente en moulinette dans la “Corde magique” qui me redonne des frissons. “Bon tu vas me la faire en moulinette ce Fakir. C’est trop chaud pour une initiation en tête, ok ?” Petit sourire complice …. Il a bien compris que je me suis fait un peu peur.

Augustin part. J’adore sa gestuelle. Précis, économe, il grimpe vachement bien. Je bois tous ses mouvements et l’espace d’un instant l’image de Patrick, l’autre grimpeur-danseur avec qui j’ai eu la chance de partager multes cordées,  me revient. … Concentration … Il arrive au crux. “Je te suis Augustin, tu peux y aller.” Il hésite et puis  à bout de force,  le grimpeur de salle qu’il est encore essaie le classique jeter du désespoir, non préparé et totalement inconscient. Et notre bonhomme retombe comme un sac de patates dans son baudrier. “Bon t’es pas en salle hein!” Vexé il repart et … passe de belle manière. Mince il est fortiche ce petit ket.
Dernier pas près du relais, il arrive au bout: “Dom comment t’as pu passer tout cela en tête? C’est haut, j’ai les boules.” Ca c’est ce qu’ont appelle  les petits moments de fierté qui te font gonfler le torse. “Hé oui Augustin, c’est l’expérience tu sais …” mais cela ne dure jamais longtemps.

Il redescend en ventilant au maximum … de l’arrière train  et nous nous échangeons une poignée de main et un regard rapide mais vrai. Je ravale la corde un peu trop vite et … merde le noeud n’est pas défait, la corde coince dans le mousqueton du haut. Tu parlais d’expérience? Bon va falloir que  je grimpe cette p… de “corde magique” alors… Moment d’angoisse et de solitude vite rompu par les encouragement du compagnon de cordée:  “Dom repose toi et n’hésite pas à tirer sur tout les clous” me lance-t-il, un brin culpabilisé. Belle maturité à 16 ans certes, mais surtout énorme connivence !

Je me lance. Il me suis complètement. Je le vois et le sens sans me retourner. Bonheur ! Réveil! Putain ce premier clou est haut … “Saint coinceur à l’aide …” Tout est dans la tête, je te dis.  Cette voie est magnifique. Main gauche dans une fissure, main droite dans la deuxième fissure, tout est beau. “Allez Dom, vas-y”. Je sens à la corde qu’il suit tout mes mouvements avec précision. Il y a longtemps que je n’ai plus ressenti  aussi fort un vrai compagnon de cordée. Cette voie est magnifique, je l’ai déjà dit mais c’est ce que je ressens à ce moment mais merde … comment ai-je pu la réussir il y a 27 ans avec mes EB alors que là je sucre les fraises? Poussé par un moniteur Adeps qui en avait marre de grimper sous la pluie et  m’avait amené ici, j’étais insatiable. Il n’avait plus envie de grimper alors il m’a lancé: “vas-y”. Inconscient, je suis arrivé au relais d’un coup sous ses yeux ébahis, … et les miens … alors aujourd’hui tu devrais pouvoir y aller aussi non?
La corde glisse dans les mousquetons et Augustin est toujours là au bout de cette corde par la magie de laquelle je ressens ses doigts, ses mains et ses yeux qui suivent ma progression fusionnelle avec ce calcaire dinantais. Très grand moment!

Relais!  Nous y sommes … YES!

Pourquoi diable a-t-il fallu attendre ce jour pour y revenir  à cette Corde Magique? Serait-ce la magie du vrai compagnon de cordée qui faisait défaut?

Merci Augustin.

Dom

PS: photos disponibles ici