Programme ;
Arrivée le 29 janvier à Genève après une nuit de bus
Retour en bus le 3 février de Zürich à Bxl.
Entre les deux ? On se débrouille par tous les moyens pour aller d’une ville a l’autre en traversant les plus beaux paysages du pays du Yodel !

Notre voyage en Suisse a commencé comme une idée folle. Au lieu de faire le Luxembourg à vélo, comme on l’avait imaginé, on a décidé de prendre un flixbus pour Genève et de traverser le pays à pied jusqu’à Zurich. On ne savait pas trop ce qui nous attendait, mais on était prêts à vivre une aventure inoubliable.

Mon coloc Hugo n’avait jamais dormi en tente de sa vie, mais il était motivé à tenter l’expérience. On a pris le minimum de bagages, juste une tente, des sacs de couchage, des vêtements chauds et de quoi manger. On a passé la première nuit en auberge à Genève, pour être bien reposés avant de commencer le trek.

Le lendemain, on a pris le train pour Fribourg, car on s’est rendu compte que la distance était trop importante pour tout faire à pied. Le billet nous a coûté une fortune, mais on s’est dit que ça valait le coup. On a commencé à marcher sur des sentiers de randonnée, en admirant les paysages magnifiques de la Suisse. On voyait des montagnes enneigées, des lacs scintillants, des forêts verdoyantes et des villages pittoresques. On marchait entre 15 et 25 km par jour, avec 400 à 1000 m de dénivelé positif. On était fatigués, mais heureux.

On dormait sur la neige tous les soirs, dans un endroit qu’on trouvait. On montait la tente, on faisait un feu, on mangeait un morceau et on se couchait. Les deux premières nuits se sont passées sans encombre, mais la troisième fut plus difficile. On avait marché plus longtemps que les jours précédents, et le soleil était déjà couché. On était épuisés, et on avait froid. Hugo a eu la bonne idée de faire une tisane de sapin, à partir de neige fondue et de branches épineuses vertes de sapin. Il m’a dit que c’était bon pour la santé, et que ça réchauffait d’après une vidéo Youtube. J’ai accepté d’en boire une gorgée, mais j’ai vite regretté. C’était amer, et ça me brûlait la gorge. Hugo, lui, a bu toute sa tasse, en faisant des grimaces. Il a dit que c’était délicieux, mais je n’étais pas convaincu d’ailleurs il rajoutait sans cesse du sucre.

Quelques heures plus tard, il s’est réveillé en pleine nuit, en hurlant. Il avait mal au ventre, et il se sentait nauséeux. Il a couru hors de la tente, et il a vomi tout ce qu’il avait mangé. Il a aussi eu une diarrhée fulgurante, qui l’a vidé de tous les liquides que le corps humain peut vider. Il était pâle, et il tremblait. Je ne me suis pas levé pour aller le voir, mais j’espérais qu’il reviendrait en vie.  Je lui ai donné de l’eau, et je l’ai aidé à refermer son fichu sac de couchage dont la tirette s’ouvrait sans cesse. Il s’est recouché, en gémissant.

Le lendemain, le réveil a été dur. Hugo était faible, et il avait du mal à se lever. Il avait toujours mal au ventre, et il avait la tête qui tournait. Il m’a dit qu’on ne pouvait pas continuer à marcher, et qu’il fallait qu’on aille à Berne. J’étais d’accord. On a rangé nos affaires, et on est allé au village le plus proche, pour prendre un bus. Le trajet a duré une demi-heure, et Hugo a dormi tout le long. Il avait l’air d’un zombie.

Arrivés à Berne, Hugo a décidé de passer la nuit en auberge, pour qu’il puisse se reposer. Il a pris une douche, et il s’est couché.

Moi, j’avais encore envie de dormir en extérieur, alors je suis allé avec ma tente jusqu’au point le plus haut de la ville, pour y trouver un spot où dormir. Je voulais profiter de la vue sur Berne, qui était illuminée par des milliers de lumières. J’étais sans doute plus fatigué que je ne voulais l’admettre, car j’ai perdu mon GSM en chemin, et j’ai passé plus d’une heure à le chercher désespérément. J’ai fouillé partout, mais je ne le trouvais pas. J’étais paniqué, car c’était le seul moyen de communiquer avec Hugo, et avec ma famille. J’ai demandé de l’aide aux passants, mais personne ne l’avait vu.

Finalement, un couple suisse m’a aidé à le chercher. Ils étaient gentils, mais ils ne parlaient pas un mot de français. Ils m’ont dit  qu’ils habitaient à Berne. Ils m’ont dit qu’ils aimaient la randonnée, et qu’ils étaient impressionnés par notre voyage. Ils m’ont posé plein de questions, et ils ont ri quand je leur ai raconté l’histoire de la tisane de sapin. Comme il faisait vraiment trop sombre, on a fini par abandonner les recherches mais me voyant seul dans le froid, ils m’ont proposé de m’inviter à manger avec eux.

On a marché pendant une dizaine de secondes, et on est arrivés devant un magnifique restaurant, avec une terrasse panoramique. Il y avait des tables dressées, des bougies allumées, et de la musique douce. Ils m’ont dit que c’était leur restaurant préféré, et qu’ils venaient souvent y dîner. Ils m’ont dit qu’ils avaient réservé une table pour eux, et qu’ils m’invitaient à les rejoindre. Ils m’ont dit qu’ils seraient ravis de me faire découvrir la gastronomie suisse. Ils m’ont dit qu’ils étaient sûrs que mon GSM allait réapparaître, et qu’il ne fallait pas que je m’inquiète.

J’étais surpris, et touché par leur générosité. Je n’avais pas envie de refuser, car ils étaient vraiment sympas. Je me suis dit que ça ne pouvait pas me faire de mal, et que ça me changerait les idées. J’ai accepté leur invitation, et je les ai suivis dans le restaurant. Ils m’ont fait asseoir à une table, près de la fenêtre. Ils m’ont offert un verre de vin, et ils m’ont dit de choisir ce que je voulais dans le menu. Ils m’ont dit qu’ils avaient une spécialité, le rösti, qui était une sorte de galette de pommes de terre, avec du fromage et du jambon. Ils m’ont dit que c’était délicieux, et qu’il fallait que je goûte. J’ai accepté, et je leur ai fait confiance.

Le repas était succulent, et l’ambiance était agréable. On a parlé de tout et de rien, et on a rigolé comme des fous. Il étaient charmants, et ils m’ont presque fait oublier mon souci de téléphone. Ils m’ont raconté des anecdotes sur leur vie, et m’ont demandé de leur en dire plus sur notre voyage et l’origine de cette folle idée. J’ai fini par les quitter pour retourner à mon froid campement, mais au moins j’avais l’estomac bien rempli.

Le lendemain, on a pris un blablacar pour Zurich, une vieille voiture de 6 places bondée et remplie de matériel et de nourriture. En parlant avec le chauffeur, on a appris qu’il aidait les réfugiés dans un camp à Zurich. Arrivés en ville, la police suisse-allemande nous a arrêtés, et nous a interrogés. Je crois qu’ils ont cru qu’on était des trafiquants, ou des terroristes. On leur a expliqué qu’on avait fait un voyage à pied en Suisse, et qu’on avait dormi sur la neige. Ils nous ont laissé partir, après avoir vérifié nos identités et on a enfin pu prendre notre bus pour Bruxelles.

Ce voyage n’était sans doute pas une prouesse sportive, mais il m’a permis de créer un véritable lien d’amitié avec mon coloc. On a vécu des moments forts, des moments drôles, et des moments difficiles. On a appris à se connaître, à se soutenir, et à se faire confiance. On a partagé une aventure inoubliable, et on en garde un bon souvenir. Il nous arrive encore quelquefois de rire en soirée en repensant à des anecdotes de suisse.