Première escapade avec mon filleul Henri (8 ans) dans le val ferret suisse jusqu’au GSB au mois de septembre 04

J’avais promis à mon filleul de l’emmener en montagne pour son anniversaire (mois de juin) et nous sommes finalement partis au mois de septembre par un superbe créneau météo. Départ de la Fouly et arrivée au Grand-St-Bernard après 3 nuits sous tente et cuisine sur le réchaud en pleine montagne. Mais c’était finalement plus un cadeau pour moi de vivre ça avec lui.
Miguel

entrehommes

Voici que je m’applique enfin à vous mettre le récit que je vous ai promis … Mais en réalité, je ne sais pas trop quoi vous raconter après tous vos messages amicaux et tellement enthousiastes. Alors je vais essayer de vous partager un peu ce que les photos, peut-être ne révèlent pas et sait-on jamais convaincre ceux qui ne le seraient pas encore.

J’ai envie d’intituler mon récit par la chanson bien connue «Prendre un enfant par la main pour l’emmener vers demain… »

Tout a commencé fort tôt puisque mon filleul est l’aîné de ma sœur. Or il se fait qu’elle habite au Luxembourg et que plus rêvé que cela comme escale pour aller faire des virées d’un w-e en Suisse, ce n’est pas possible. Depuis tout petit, donc, mon filleul m’a vu débarqué très régulièrement chez lui soit en partance, soit en provenance des montagnes et souvent avec un petit souvenir du genre Toblerone (vous savez, ce délicieux chocolat suisse en forme de montagnes…) ? Si bien qu’un matin il a mis tout seul ses grosses chaussures de montagnes aux pieds et, répondant à l’inquiétude de sa maman demandant où il partait ainsi, il dit simplement ; ‘je vais chez Oncle Miguel’, intimement persuadé d’une logique implacable que j’habitais en montagne ! Les annivesraires passèrent et après le Toblerone, les récits et photos que ses parents lui montraient sur www.capexpe.org (encore passeportexpé à l’époque) -coup de pub au passage, merci Dom ! – et la marmotte en peluche qui ne le quitte plus une seule nuit, vint 7 ans, c’est-à-dire l’âge où les jambes commencent à vraiment sentir l’appel des sentiers. C’est alors que je lui ai promis de l’emmener en montagne pour son prochain anniversaire. Quelle fête, renforcée encore par la jalousie de ses 3 frères et sa petite sœur, il en a parlé tout le temps, à la maison, à l’école… Je crois que ses 8 ans ont mis un temps interminable à arriver, tellement il s’est fait de cette montagne un royaume enchanté. Que dire de son émerveillement devant mon insigne finement brodé du club alpin suisse ramené après mon brevet ! Après ça, il fallait assurer car la barre était bien haute.

Mais à 8 ans, combien de dénivelé peut-on faire, combien de kilos peut-il porter, aura-t-il peur ou froid si on dort sous tente, n’en aura-t-il pas marre de marcher au bout d’une demi-journée… ? Et j’en passe des questions qui m’ont habité lors de la préparation de la course car pour moi, je sais à peu près évaluer mais pour un enfant ? C’était étonnant la divergence des réponses que j’ai eues… Entre la prudence excessive et l’irréalisme inconscient, j’ai finalement fait confiance à mes expériences en montagnes qui ont toujours été réussies tant qu’elles étaient vécues dans un esprit de simplicité en accord avec la nature. Tant pis s’il n’aimerait pas, au moins il aurait pu découvrir cela et faire son choix après.

Nous sommes donc partis le matin du Luxembourg et après les formalités à la douane suisse (passeport obligatoire + papier des parents pour les enfants qui n’ont pas encore de carte d’identité) avons fait les courses ensemble dans un super en Suisse pour profiter des produits locaux. Ayant encore bien en tête les nombreuses polémiques sur la bouffe (ou la malbouffe) en expé sur le site, j’ai choisi pour du frais, rien que du frais ! Oui, Jer, c’est bien une bouteille d’huile d’olive sur la photo et dans les gamelles, des aubergines fraîches, des tomates fraîches, des lentilles en sachet, des oignons, des herbes fraîches, des pâtes fraîches, des fruits frais, jambon fumé, fromage de là-haut, pain aux noix et raisins, céréales,… Rien que du frais, un peu plus facile à choisir dans les rayons qu’à caser dans le sac à dos et plus encore qu’à porter mais les dénivelés raisonnablement prévus me permettaient bien de rajouter quelques kilos !

Arrivée dans les alpages de la Fouly de nuit : on plante la tente sans trop savoir où à la lampe de poche et on s’enfile dans nos sacs de couchage pour une bonne nuit sous un ciel étoilé. Nuit sans problèmes ; on se réveille froidement au lever du soleil (8H30)  qu’on attend un peu pour sécher la tente. Henri a bien dormi et est tout excité, j’en suis un peu surpris mais tellement ravi. Petit déjeuner, on remballe tout dans la voiture et on s’arrête au bout de la route (1800m). Préparation des sacs, on bourre le mien autant que possible, il doit prendre le reste c’est à dire +/- 5 kg, ce qui est un peu beaucoup pour son âge. Il est courageux car les 30 kg que je porte ne me permettent pas beaucoup de l’alléger encore. Nous montons lentement et régulièrement en parlant beaucoup pour éviter de faire trop de pauses. Gros arrêt pic-nic puis on repart d’une traite jusqu’au lac (2500m) où nous choisissons ensemble le plus bel endroit pour le bivouac. Comme nous arrivons tôt, nous avons bien le temps préparer le repas ensemble. J’avoue que je n’y croyais qu’à moitié de pouvoir faire revenir les oignons puis les aubergines et les tomates avec de l’huile d’olive sur un réchaud à gaz mais l’expérience vaut le coup. J’aurais voulu que vous soyez là pour humer ce parfum au milieu des montagnes au bord du lac en plein coucher de soleil ! Dommage que les photos ne sentent pas ! Et de voir Henri prendre plaisir à surveiller la cuisson, goûter les pâtes et se régaler du festin, ce repas partagé avait une saveur sans égal.

Deuxième nuit : on se fait arroser mais la tente est bonne et la nuit aussi. Le lendemain, nous passons le col  (2700m) avec des sacs un peu allégés , ce qui soulage un peu Henri et, du coup, il marche beaucoup mieux. Passages sur des névés et NI obligé… Il lui a fallu une demi-descente pour adopter la technique, le plus dur était d’arriver à quitter ce terrain de jeu improvisé !!!

Nous laissons les sacs en contrebas, près de notre troisième bivouac et partons à l’ascension du Mont Fourchon (2900 et des poussières). Une corde pour l’attacher dans les passages un peu aériens et un beau moment à observer les sommets alentours et l’Hospice du Grand-St-Bernard depuis le sommet. Il fait merveilleusement doux et la météo est toujours exceptionnelle. A la descente, nous refaisons un cairn, un détour par un groupe de fleurs…Nous retrouvons les sacs, décidons du meilleur bivouac et on se choisit une cuisine. Nous partageons le repas en face de l’hospice tantôt envahi par les nuages montant de la vallée. L’humidité ambiante laisse présager un orage qui s’est confirmé pendant presque toute la nuit, c’est Henri qui me l’a dit, moi je n’ai rien remarqué !

On se lève tôt (7h30…) pour avoir le temps d’assister à la messe à l’hospice (10H30). Nous avons même le temps de visiter le musée et le chenil avec les authentiques St Bernard.

Nous prenons ensuite le bus (pas gratuit !) qui nous reconduit près de notre départ et de la voiture.

Si je vous ai raconté tout cela, c’est pour vous partager techniquement notre voyage pour que vous puissiez, si l’envie vous prenait, en tirer quelques infos, peut-être, mais pas seulement… C’était une joie immense et un moment vraiment privilégié de vivre ça avec mon filleul, « entre hommes ». Mais par-dessus tout, ce qui m’a vraiment impressionné, c’est que partir ainsi à l’aventure dans un lieu inconnu pour trois jours et trois nuits, y planter la tente et cuisiner sur le réchaud était, finalement, pour mon filleul la chose la plus naturelle au monde. Même pas froid, même pas fatigué, même pas de douleurs…Et cela m’a confirmé une belle leçon de confiance et de simplicité que je vis chaque fois que je pars en expé. Qu’est-ce qui est plus simple et naturel que de vivre ainsi, si proche de la nature et de son rythme? Quelle belle réponse à ce monde angoissé que celle de mon filleul qui est parti sans connaître et sans inquiétudes, plein de joie et tout disponible à la découverte. Si vous avez des enfants, un(e) filleul(e), des ami(e)s… Faites-leur ce cadeau ! Foncez, vous regretterez de ne pas l’avoir fait plus tôt ! Mais je devrais dire : faites-vous ce cadeau !

Vivement la prochaine expé, j’espère pouvoir l’emmener cet hiver en ski de randonnée au GSB…

Miguel