Bien le Bonjour, amis randonneur.
Notre projet est de traversée le Spitzbergen de Longyearbyen a Pyramiden tout en retournant parmis les grandes vallées enneigées des montagnes.
Nous effectuerons, si tout est oké dans les paramètres de sécurité, deux traversées de Fjord en Packcraft, a fin de nous faire économiser de précieux kilomètres, et pouvoir ainsi réaliser une boucle.
Expédition
Après avoir tout préparé pendant plusieurs mois, le 7 mars 2022 nous partions enfin pour notre expédition. Depuis que j’avais rencontré Gaël, il me parlait du Nord et mon envie de le suivre a germé.
Je ne sais plus comment, sincèrement, le plan du Svalbard est arrivé sur la table. Directement, j’ai été emballé. En regardant sur internet, je découvre la ville abandonnée de Pyramiden. Un des derniers vestiges de l’URSS encore intact, tel un musée, gardé par le froid nous rappelant une époque révolue. Je fais part de mon envie d’y aller à Gaël si nous partons là-bas. L’endroit se trouve à une centaine de kilomètres de Longyearbyen, la capitale de plus ou moins 3000 habitants, où nous arriverons avant de partir pour les plaines, les fjords et les montagnes.
Rapidement, Gaël me dit que Morgane fera partie de l’aventure. Une jeune française de 24 ans qui suit ses périples depuis quelques années déjà. Elle l’avait contacté à plusieurs reprises pour prendre part à l’une de ses expéditions polaires.
Nous commençons environ cinq mois avant l’expédition une préparation physique. Nous allons plusieurs fois par semaine à la salle ensemble. A cette époque, nous vivions ensemble avec Gaël dans un squat à Bruxelles. Régulièrement dans notre quotidien, nous nous retrouvions à parler de l’expédition, des difficultés, des paysages, du froid, des choses à ne pas faire ou ne pas oublier.
Gaël avait créé une discussion de groupe avec Morgane où nous échangions régulièrement. Après avoir pris les billets d’avion, nous commençons l’itinéraire via des cartes et les envies de chacun. Nous passerons donc par Pyramiden avant de revenir vers Longyearbyen en passant par les plaines à l’Est de l’île.
Début janvier, Gaël et moi partons dans les Fagnes, une région dans l’est de la Belgique, pour un weekend de préparation en vue de l’expédition. Je rencontre alors Dominique, responsable de Cap Expé, une association qui prête du matériel à prix libre pour ce genre de voyage. C’est une vieille connaissance à Gaël. Il nous fait une formation sur la gestion du froid et des erreurs à n’absolument pas faire.
Dans l’idée de l’expédition, nous est venu le plan de trouver deux fjords en bateau pour couper la carte et gagner du temps sur nos 17 jours. Dominique nous prête alors des packrafts qui pourraient faire l’affaire. Il nous propose de les tester dans l’amblêve, une rivière en crue pas très loin de chez lui
Après une nuit dans son jardin, à une température négative, nous partons pour cette descente qui s’annonce sportive. Après avoir laissé la voiture à la cascade de Coo, nous faisons du stop jusque Stavelot où nous commencerons notre descente. Un Lun Limbourgeois en week-end dans la région s’arrête avec son 4×4 flambant neuf pour nous prendre. Accompagné de son fils, il nous demande où nous allons. Nous lui expliquons notre idée de descendre la rivière. Nous roulions juste à côté de celle-ci quand nous lui avions dit. Il nous demande si on est sérieux, si on va bien descendre la rivière en crue avec -1 degré. Nous lui répondons que bien sûr, c’est ce que nous allons faire et que nos « bateaux » nous attendent à Stavelot, cachés dans un buisson. Etonné et curieux de ce que nous lui racontons, il dit ‘il nous y dépose et qu’il veut nous voir. Une fois arrivés, nous gonflons les packrafts avec l’aide de son fils. Nous leur expliquons qu’on se prépare pour une expédition polaire.
Le froid nous rappelle notre vulnérabilité, la faiblesse de nos corps mais aussi sa résilience. La nature est définitivement plus forte que nous. Nous sommes sujets à ses envies et ses caprices.
Nous ne sommes que tas de chair et d’os, nous ne pouvons faire face aux éléments. Seulement nous adapter. Entre les montagnes de l’Arctique, dans ces paysages désolés me rappelant le sud Lipez Bolivien, je me questionne à nouveau, sur l’existence d’une force supérieure. Une énergie créatrice.
Nuit jour 5 à jour 6
Je me suis réveillé en sursaut, imaginant les pattes d’ours écrasant la tente. J’ai réveillé Gaël immédiatement, lui ordonnant de sortir le Mausen. Je n’avais pas rêvé, j’avais entendu des pas dans la neige. J’ai donc sorti la tête, essayant d’apercevoir l’origine du bruit dans cette nuit éclairée par la lune.
Mon cœur battait, je l’entendais résonner dans mes oreilles. J’appréhendais la confrontation avec l’ours polaire.
En regardant dehors, j’aperçois un renne plus loin marchant dans le cour d’eau que remontions et dans lequel nous avions élu domicile pour la nuit.
Jour 4
Nous commençons la journée avec une énorme descente dans laquelle je me casse la gueule, entendant de la descendre assis sur une pulka, comme une luge.
Après avoir rejoint la mer, nous la longeons sur une pente escarpée et accidentée plongeant directement dans les eaux glacées. Nous nous rendons vite compte qu’il est difficile d’avancer sur ce terrain mais nous continuons. Les obstacles et les difficultés s’enchaînent. Ma pulka trop chargée me ne fait que se retourner. Ma peur est qu’elle se mette à faire des tonneaux, ce qui m’entraînerait avec elle, dans un aller simple pour les fonds de la mer de Barents.
Jour 7 :
Depuis hier midi, nous sommes loqués dans notre tente entre deux sommets de montagne. On ne voyait plus rien, enveloppés ‘un nuage blanc, il devenait dangereux d’avancer. La tempête arrivait. De plus, la neige nous collait aux skis ainsi qu’aux pulkas, nous empêchant d’avancer correctement. J’avais l’impression de porter des buffalos de la taille de mes skis. C’était pénible et fatigant.
On a donc décidé de monter le camp. On ne voyait absolument rien. Nous étions dans une légère pente mais nous ne savions pas où elle s’arrêterait. La seule solution était de créer un espace plus ou moins plat à l’aide de nos pelles à neige et de la tasser tant bien que mal avec nos skis.
Sous la quantité de neige qui tombait et qui par la surprenante température positive, nous trempait jusqu’aux os, la tâche n’était pas facile.
On a réussi à monter la tente de Morgane assez rapidement. On a enchaîné avec la nôtre avant de rentrer nos affaires à l’intérieur. Mes pieds étaient trempés, mes gants aussi, ainsi que ma doudoune et mon sac. J’ai directement sorti le sac de couchage pour me réchauffer, pour après sécher mes affaires en les portant. C’était notre seule solution. Au-delà du fait que tout se mouille, les températures des prochains jours seront bien en-dessous de zéro. C’est ce qui m’inquiétait. Tomber malade ou être dans l’impossibilité de continuer.
Le lendemain, la situation n’avait pas changé. Nous étions voués à rester dans l’espace exigu de nos tentes une journée de plus. Cela rendait beaucoup de choses bien plus compliquées que prévues. J’aurais préféré qu’il fasse plus froid. Il est alors facile de sécher ses affaires, par le simple principe de sublimation. L’humidité gèle et nous n’avons plus qu’à brosser nos affaires pour enlever les cristaux de glace.
Passer plus de 24 heures dans une tente, à deux, c’est long. Mais nous n’avions pas le choix. Le mal de dos se fait ressentir. On change alors tactiquement de position pour l’espace de quelques minutes afin de soulager les maux. Le toilette devient également un problème. On utilise une bouteille pour l’urine, prévue à cet effet. Pour le reste, on se retient pour retarder le moment où l’on devra sortir de la tente.
Notre tente, construite pour le milieu polaire, résiste au froid extrême ainsi qu’à des vents coucher des grands arbres. Cependant, elle réagit bien mal à la pluie. Des gouttes, qui auraient gelé par un temps froid, tombent sur nos sacs de couchage. Le problème de cette humidité, c’est qu’elle diminue la résistance au froid de notre matériel et pourtant nous ne sommes pas encore arrivés.
Nous pensons pouvoir rallier Pyramiden en 4 jours, une fois que nous pourrons redémarrer. Avec la quantité de neige tombée et les difficultés sur la route, j’espère que 3 jours nous suffirons.
Jour 8 :
Après une journée passée dans la tente, à cause des températures positives et de la pluie, il fait magnifique en fin de journée. Quelques nuages de coton flottent dans le ciel, le soleil brille. Nous découvrons enfin où nous sommes, entre quelques sommets de montagne, en haut du glacier, sur une plaine légèrement en pente.
Nous décidons de nous remettre en route le lendemain. Il fait -5°C, ça devrait encore descendre durant la nuit. La neige sera parfaite pour continuer demain matin.
Après avoir mangé dans la tente de Morgane, je m’empresse de me remettre dans mon sac de couchage. Mes chaussures ayant pris l’eau 2 jours plus tôt avaient gelé. Le temps de manger avait suffi pour me congeler les pieds. J’avais du mal à me réchauffer. Mes pieds restaient froids, et le haut de mon sac de couchage était encore humide, ce qui lui faisait perdre en efficacité. Je peine donc à m’endormir. Je mets un long moment à me réchauffer, à me sentir bien pour m’endormir.
De plus, le moindre bruit suspect réveille mes sens et je suis alors en alerte, comme une proie, par cette présence d’ours polaires sur l’île. Mon sommeil est donc condamné à rester léger, interrompu.
Je pense avoir somnolé un moment avant de me réveiller complètement par ce que je pense être une pluie torrentielle, ou de la grêle. Je n’en sais rien. J’étais dans la tente au fond de mon pieu. Je suis étonné de la puissance de cette précipitation.
Je n’ai pas eu le temps de m’interroger plus longtemps qu’un vent d’une puissance destructrice se lève. La tente plie. A peine réveillé, je ne comprends pas ce qu’il se passe. Les bourrasques malmènent la tente, la faisant se plier, courbant les arceaux de plus en plus fort.
Nous tentons avec Gaël de tenir les arceaux malgré tout. La fureur du vent déplace des tas de neige et la pente en-dessous de la tente que nous avions mise à niveau deux jours plus tôt se fait ressentir de plus en plus. L’espace de la tente se resserre. Une rafale me projette sur Gaël, qui passe ses jambes au-dessus de moi pour nous maintenir. Les sacs ont volé. Plus rien n’est en place. Nos deux corps forment une croix dans la tente, tentant de ne pas nous envoler et de maintenir la tente au sol.
Je pense à Morgane, seule dans sa tente, à côté de nous. Je pourrais gueuler qu’elle ne m’entendrait pas, le vent est trop fort, faisant trembler les bâches des tentes, rendant toutes conversations impossibles.
Dans un fracas, je comprends que les arceaux de notre tente se brisent les uns après les autres. Le vent est de plus en plus fort, inépuisable. Nous encaissons les coups, de plus en plus confinés dans cet espace qui se rétrécit. Nous tapons régulièrement avec nos pieds sur le haut de la tente pour ne pas être ensevelis. C’est une lutte constante. Chaque seconde de répit que nous donne la tempête, nous tentons de nous organiser pour maintenir la tente en place et placer des sacs à des endroits stratégiques pour garder un espace minimum dans la tente.
Les entrées sont presque condamnées par la neige. Morgane nous a dit entre deux rafales qu’elle pense ne plus savoir sortir de sa tente. La situation devient vraiment critique. Nous pensions attendre que ça se calme pour analyser l’ampleur des dégâts. Nous ne voulons pas appeler les secours. Cela signifierait la fin de notre expédition après tant de préparation, après des mois d’entraînement, tant d’argent dépensé. On prend _a comme un échec et on en veut pas se rendre. Nous sommes à deux jours de Pyramiden, peut-être 3. On y est presque. On ne peut pas s’arrêter maintenant.
L’espace de la tente a encore rétréci. Le vent est toujours aussi violent, nous laissant juste des moments de pause pour échanger quelques mots avec Morgane pour se soutenir. Elle nous dit qu’elle est en boule, recroquevillée dans sa tente. Elle serait presque totalement ensevelie. A cet instant, la bâche extérieure de notre tente se déchire. Tous les arceaux ont lâché.
Nous ne voulions pas le faire mais je décide d’appeler les secours. Je ne sais même pas s’ils viendront avec le vent et l’endroit reculé dans lequel nous sommes. Je crie à Morgane de le faire qui a le téléphone satellite. Elle opère.
Après un échange de quelques messages sur la situation avec le centre de contrôle, ils nous communiquent qu’ils nous prennent en charge et qu’une équipe viendra dès que possible. Cela peut prendre plusieurs heures, nous sommes loin dans les montagnes et les conditions météorologiques compliquent énormément le sauvetage. Cependant, nous sommes plus sereins depuis que nous avons appelé. Nous savons qu’ils viendront et qu’il faut tenir jusqu’à leur arrivée.
La nature est forte. Elle est puissante, majestueuse. La force des éléments nous donne une réelle leçon d’humilité, nous rappelant notre condition, nous ramenant au caractère fini de notre existence. Voyager sereinement dans le milieu polaire mais aussi dans toute autre région inhospitalière du monde ne peut se faire qu’avec l’acceptation de la mort comme compagnon de route. Elle est une éventualité, une possibilité, parfois au milieu du chemin ou celui de nos amis.
Nous ne sommes que des fous, des inconscients, pour ces gens qui nous regardent, jouant de nos existences, défiant le Divin, l’Eternel. Et si l’essence même du feu grégeois de nos vies y résidait-il ?
Nous fardions notre calme dans ce chaos. Je partage alors un chocolat avec Gaël. Je ne sais pas combien de temps est passé depuis l’appel des secours. La notion du temps prend une autre dimension. Nous décidons de nous habiller, de nous préparer pour leur arrivée. Nous tentons de mettre la main sur nos vêtements dans le désordre chaotique qu’est devenu l’espace rétréci de notre tente. L’opération n’est pas une mince affaire. Nous sommes l’un sur l’autre. Nous invectivons ? à Morgane de faire pareil, sachant qu’elle est dans une situation pire que la nôtre, en position fœtale dans sa tente presque enterrée par la neige.
Une fois habillé, je prépare mes chaussures sans les mettre car elles sont gelées. Je retarde cette action pour quand j’entendrai le son de l’hélicoptère. Je me re-glisse dans mon sac de couchage comme je peux pour me maintenir au chaud le plus longtemps possible. Je dispose mon sac à dos noir à mon ôté, comprenant mes appareils photos, mes carnets, mon passeport et mes livres, plus importants que mes vêtements, mes skis et le reste du matériel.
Le vent a failli mais il reste puissant, continuant à projeter de la neige sur nos tentes. Il a déformé le paysage, modifié le relief sous nos pieds, même si actuellement, je suis les quatre fers en l’air tente de maintenir la tente avec nous tout en enlevant la neige qui nous recouvre en la dégageant avec des coups de pied à cadence régulière. L’idée de la fin, celle de mourir ici m’était passée dans la tête au début de la tempête. Elle avait été éloignée depuis, comprenant que nous pouvions nous en sortir.
Les arceaux cassés produisaient le son d’un concert de percussions aigües, martelé par le claquement du tissu de la tente dans le vent accompagné du bruit sourd du vent qui souffle sans répit. Deux heures étaient passées depuis l’appel quand nous avons entendu ce qui ressemble à un hélicoptère au loin. J’ai pensé que ce n’était qu’un bruit de mon imagination dans le vacarme de la tempête, que les secours viendraient probablement en moto-neige par le vent. Pourtant non, le bruit des hélices se faisaient entendre de plus en plus disctinctement. J’allume alors ma lumière, ma lampe frontale, au maximum, et je regarde vers le ciel. Je suis persuadé que la lumière les aidera à mieux nous localiser dans cette nuit noire, sombre, et mouvementée. Il s’est avéré plus tard que ce fut un des éléments salvateurs et essentiels.
Quand l’hélicoptère a approché, une lumière divine a éclairé la tente. Ebloui, j’ai tenté d’ouvrir la tente. La tirette a peine entrouverte de quelques centimètres que la neige s’est mise à valser dans la tente. Le vent m’empêchait presque de sortir. L’interstice permettait tout juste de m’extirper tout juste de notre prison. Je n’avais pas trouvé mes gants, j’avais posé mes mains dans la poudreuse pour m’aider à sortir. J’avais miraculeusement trouvé le fusil enfoui sous la neige, en sortant. La neige, plus le contact du métal et le vent, me glaçait les mains tout comme mes pieds endoloris par les chaussures gelées.
En me relevant, je me suis retrouvée face à face avec un sauveteur dans un accoutrement de cosmonaute de couleur rouge. J’étais ailleurs, dans un rêve, dans un film, sur une autre planète. La neige faisait des tourbillons éclairés par les spots puissants. Sans réellement comprendre ce qui se passe, il m’ordonne de rapidement prendre l’essentiel. Je lui tends l’arme qu’il redépose contre la tente. J’attrape mon sac, mon thermos et il m’amène jusqu’à l’hélicoptère. Je dois fermer les yeux à cause de cette neige qui me fouette le visage violemment. Je tombe à deux reprises en l’enfonçant jusqu’aux cuisses dans la poudreuse. Lorsque nous arrivons à hauteur de la porte, elle s’ouvre, et deux hommes m’attrapent et me hissent dans la cabine tel un sac de farine. Je suis assis sur un siège et on me met un casque sur les oreilles, une couverture qui me recouvre. Je ne comprends rien, je ne réalise pas.
Rapidement, je suis rejoint par Gaël, il arrive choqué, je me dis que c’est la même image qu’ils ont eue de moi quand je suis arrivé. Il me dit qu’il crève de mal aux doigts. J’espère qu’il n’a pas une gelure. Je ne sens plus mes pieds.
Une femme est assise en face de moi. Elle me demande combien nous sommes. Je lui dis que nous sommes trois, qu’il manque une femme, Morgane, dans la tente d’à côté. Le temps passe, quelques minutes qui sont longues… Je vois et je ressens que l’équipage est sous tension. L’hélicoptère est en stationnaire au ras du sol, il tremble fortement sous les bourrasques du vent.
Les minutes passent, six sept, je ne saurais dire. Je ressens l’inquiétude générale. Finalement, j’aperçois un sourire sur le visage de la femme assise en face de moi. Elle me lance un regard bienveillant pour me faire comprendre que Morgane arrive. Je vois la porte qui s’ouvre. Elle est tirée à l’intérieure. Ils la mettent en face de Gaël, à côté de cette femme. L’hélicoptère s’envole, on est secoués. C’est mon baptême de l’air cette nuit. Je comprends que les conditions sont compliquées et périlleuses. Le vent et les trous d’air nous offrent des sensations de montagnes russes. Je rigole de ces sensations dans ce moment de stress, presque tragique. La pression redescend et j’ai un fou rire par les sensations du vol. Puis, je passe dans un état de profonde tristesse quand je réalise que c’est la fin. Notre expédition est terminée. L’Arctique aura eu raison de nous. Le nord nous a barré la route. Le vol se stabilise. Je regarde par la fenêtre. Nous survolons la mer de Barents, j’observe cette mer agitée, les eaux noires et les écumes blanches brillant dans la nuit. Je me réchauffe mais je ne sens plus mes pieds.
On atterrit à l’aéroport de Longyearbyen. Retour à la case départ sans avoir bouclé notre itinéraire, en ayant perdu toutes nos affaires laissées en haut du glacier. Nous enlevons nos casques. La femme en face de moi se présente, Elisabeth, elle fait partie de la police. Elle nous explique qu’une fois que l’hélicoptère sera dans le hangar, nous serons conduits dans une pièce où nous pourrons décompresser quelques minutes avant qu’elle ne prenne une déposition pour l’assurance sur ce qu’il s’est passé.