Ski de Randonnée nordique en Laponie – Avril 2000 !
La Laponie prolonge au Nord le socle du “Bouclier Baltique” et au Nord-Ouest la chaine scandinave. Lors des grandes glaciations quaternaires, le socle a été recouvert d’une calotte de glace, puis à la fin du quaternaire, le sol, débarassé du poids des glaces, s’est lentement (un mètre par siècle) surélevé. L’érosion a déterminé des moutonnements, des dépots morainiques enchâssant les lacs, des cordons de sable (osers), tout le choas de tros laissés par les culots de glace.
La Laponie se situe à mi-chemin entre l’Europe et les archipels glacés de la mer artique: Spitzberg, Terre François-Joseph, archipels sibériens. Aussi le climat est-il la résultante de cette latitude très septentrionale, du voisinage de la grande plaine russe et, jouant en sens inverse, de la présence d’une branche du Gulf Stream qui vient se perdre dans la mer de Barents; les températures sont relativement plus élevées sur le littoral qu’à l’intérieur des terres.
La population lapone s’élève à 35 000 habitants dont environ 10 000 établis en Suède. Le peuple lapon se qualifie lui-même de Same, mais depuis le Moyen-Age en Suède on use aussi souvent d’une dénomination que de l’autre: les textes officiels ne connaissent que les Lapons alors que la presse parle des Sames. Quant aux intéressés, ils semblent avoir une préférence pour le mot same.
Les Sames sont mentinnés pour la première fois dans l’histoire un siècle apres J.-C. par Tacite qui les appelle Fenni; Finne ou Finn, comme disent les Norvégiens, est donc une vielle appelation des Sames. Ils appartiennent à la culture artique, mais contairement aux autres peuples artiques, ils sont entrés très tot en contact avec les peuples plus méridionaux, et les brassages ont étés plus importants.
Ethnographie
On divise l’ethnie lapone en quatre groupes: les Lapons des montagnes, qui résident dans la chaine de hautes montagnes séparant la Norvège de la Suède avec les contreforts orientaux (lagfjällen) et les profondes vallées encaissées; les Lapons des forêts, de la Suède et de la Finlande septentionales ainsi que de la presqu’île de Kola, ces derniers étant des Skolts dont le nombre ne dépasse guère 5 à 600; les Lapons des lacs et rivières, que l’on rencontre surtout dans le Finnmark intérieur (Norvège), dans le Jämtland, et les vallées des grandes rivières suédoises; et enfin les Lapons du littoral que l’on trouve principalement en Norvège.. Ces diverses dénominations sont donc déterminées par les conditions géographiques et, tout naturellement, par le mode de vie.
Bien que le grand public soit porté à voir dans tout Lapon un nomade, et ceci depuis toujours, il s’avère que le nomadisme qui est relativament récent, est en voie de disparition. En effet, à l’origine, la pêche, la chasse, et un petit élevage de rennes constituait les ressources d’une communauté spontanément établie et fortement structurée à la tête de laquelle était placée une sorte de syndic. Les familles avaient, de décembre avril, un point central de rassemblement, le village d’hiver, lieu même ou devaient s’édifier au XVIIe siècle les premières églises lapones. Puis vint le temps ou le renne étant devenu l’élément essentiel de l’économie lapone, la vie quotidienne en dépendit tant qu’il constitua une économie naturelle, soit comme bête de trait, soit comme moyen de locomotion. Actuellement, en raison de l’industrialisation, le renne, dans l’économie générale du pays, n’est guère le plus souvent qu’un animal de boucherie qu’engraissent des propriétaires installés dans les régions de pâturage d’automne et de printemps, à proximité des forêts de conifères. Cette même industrialisation -établissement de voies ferrées, installations d’aérodromes, flottage du bois, exploitation des mines de Kiruna, de Gällivare (Suède), de Kirkenes (Norvège), création des centrales hydroélectriques de la vallée du Kemijoki (Finlande)-, tout en réduisant les superficies de pâturage pour les rennes, a offert d’autres débouchés aux Lapons et les propriétaires de troupeaux de rennes sont beaucoup moins nombreux qu’autrefois, sinon plus riches.
Les dialectes
La langue lapone, apparentée au Finnois, fait partie du groupe finno-ougrien qui comprend neuf langues. On connaît sept groupes de dialectes lapons qui ne tiennent pas compte des frontières nationales: le lapon de Kola est parlé à l’extrème Est, le lapon finnois, ou lapon d’Enare (Enari), est celui des alentours du lac Inari (Finlande), le lapon central, également appelé lapon septentrional, est parlé du point méridional de l’Ofotfjord (Norvège) jusqu’à Utsjoki (Finlande), en passant par le Finnmark et la vallée de la Torne (Suède). Viennent ensuite, dans le groupe des dialectes du Sud, le Lapon de Lulea, le lapon de Pitea, le Lapon d’Umea, et le lapon méridional. La frontière dialectale la plus nette est constituée par le fleuve Kalix. Au Nord de ce fleuve, les dialectes divers présentent beaucoup d’affinités, alors qu’ils en ont beaucoup moins avec ceux qui sont parlés au Sud.
En tant que langue littéraire, le lapon n’a eu qu’un emploi limité bien qu’il soit écrit depuis le XVIIe siècle, mais en fait la production littéraire ne concernait que des ouvrages religieux. Le Nouveau Testament a été traduit en 1755 et la Bible en 1811. C’est seulement au début du XXe s. que des écrivains lapons se sont exprimés directement dans leur langue. En 1910, Johan Turi a publié, en lapon tornéen, Muittalus samid birra (Récits sur les Lapons), traduit maintenant en plusieurs langues, et Récits de la montagne. C’est d’ailleurs le lapon tornéen qui sert de base à une langue écrite commune aux Sames de Suède et de Norvège. Un autre ouvrage en lapon pitéen a paru en 1937: Jahtee saamee viessom (Vie du lapon nomade). Nils Nilsson Skum a publié en 1938 des oeuvres graphiques réunies sous le titre Same süda (Village lapon), accompagnées de textes en Suédois et en lapon tornéen.
Skum est un lirique. Etant lui-même éleveur de rennes, il est naturel qu’à ses yeux, le renne symbolise la vie. Ses représentations de rennes, ou de troupeaux de rennes révèlent une compréhension, un sens du rythme qui doit beaucoup plus à une intimité entre l’auteur et le monde lapon qu’à une formation scolaire.
Le jojk
En revanche, chez les Sames, comme chez les autres peuples artiques, la littérature orale est la plus importante et le jojk, ou se mèlent le chant et le poème, constitue une expression littéraire spécifique de l’art du chant lapon. On pourrait die que le jojk, qui a gardé de ses lointaines origines une signification magique, revêt autant de formes qu’il y a de chanteurs de jojk, et tout lapon, est un chanteur de jojk. Dans le jojk, le rythme est le plus souvent l’élément essentiel alors que la mélodie est souvent monotone; il existe aussi des jojk sans paroles.
Artisanat
Les Sames possèdent des dons artistiques très développés et témoignent d’un grand raffinement dans la création originale de textiles ou le travail de l’argenterie; les “lapska-troll-trummor” (tambours magiques) sont ornés d’une étonnante décoration graphique. L’artisanat d’art, devenu une ressource économique supplémentaire, joue un grand rôle dans les divers districts de Norvège, de Suède et de Finlande, mais il faut se garder des “souvenirs” et divers objects offerts le long des routes ou dans les hôtels, qui n’ont qu’un lointain rapport avec l’art lapon authentique
La Suède et ses lapons
Comme la plupart des pays européens, la Suède souffre de déséquilibres régionaux: au Sud sont concentrés les hommes et les industries qui font vivre le pays, tandis que le grand Nord, qui pâtit du développement, souhaite l’implantation d’usines tout en redoutant la destruction de sa nature encore intacte. Ces données ont conduit le gouvernement suédois à redonner vie au Nord; mais cela impliquait le développement des richesses minières, forestières, hydrauliques, touristiques et en même temps la preservation des qualités écologiques propres.Car il ne saurait être question d’industrialisation à tout prix et la défense de l’environnement est primordiale.
Dans le Norrbotten, le Fonds d’investissement du Nord, crée en 1962 et dont le siège social se trouve à Lulea, accorde des prêts aux entreprises qui s’installent ou se développent. Le Fonds est alimenté par une contribution de l’état, par le remboursement des prêts et surtout par le pourcentage des bénéfices de la LK.AB: on utilise donc les richesses locales pour les réinvestir au profit de la région. En dépit des mesures prises, la promotion économique du Norrbotten ne paraît pas encore satisfaisante et le gouvernement a été amené à prendre des mesures réellement originales: le transfert, prévu entre 1972 et 1980, de 11 000 fonctionnaires avec les services administratifs, dans quinze localités de moyenne importance, c’est-à-dire que le secteur tertiaire seconderait l’infrastructure industrielle.
La coopérative lapone
Individualistes par tempérament et par “conditionnement”, les lapons ont cependant réussi, de leur côté, au cours des cinquante dernières années, à former une association pour la défense de leurs intérets et de leur culture. Cette association, suédoise à l’origine, tint plusieurs états généraux puis parvint à créer une sorte de parlement lapon dont les ressources sont alimentées par le Fonds lapon de l’Etat. En 1944 fut crée “Same Ätnam” (qui signifie: avenir de la culture lapone) dans un but essentiellement culturel. En 1953, Same Ätnam, en, collaboration avec l’association finnoise Lappin Sivistysseura et l’association norvégiene Sami Saervi, réunit les Sames des trois états dans une conférence commune à Jokkmokk. En 1956, au cours d’une conférence semblable tenue à Karasjok (Norvège), fut crée le Conseil Same nordique dont la tâche est de “défendre les intérets économiques, sociaux et culturels des Sames d’une façon compatible avec leurs devoirs envers leurs nations respectives”. D’autres conférences Sames internordiques se sont tenues au cours des dernières années, la plus récente à Hetta (Finlande), en août 1968. Dans le cadre de la coopération internordique a été installée à Kirkenes (Norvège) une usine de cellulose qui exploite les bois d’Inari (Finlande); d’autre part, un accord finno-suédois a été établi sur l’échange d’énergie électrique au Nord du golfe de Botnie, et les possibilités de collaboration entre les trois pays dans les régions frontalières de la “Calotte du Nord” en matière hydroélectrique deviendront très prochainement des réalités.
En résumé, pour la petite société same, le problème est celui de toute société dite de “folk-culture” qui veut jouir d’une économie moderne tout en essayant de ne pas se laisser absorber par la société dominante.