Packrafting-Trekking in the Gates of the Arctic National Park, Alaska, US

Articles à paraître dans la revue “Ardennes et Alpes” du Club Alpin Belge:

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Le pouvoir des rêves n’a pas de limite
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Il y a deux ans, des étudiants de Louvain-la-Neuve m’avaient demandé d’expliquer la manière dont notre association Cap Expé encourageait l’organisation d’expéditions en tous genres. Après l’exposé, plusieurs étudiants sont venus me trouver avec mille questions. J’essayai de répondre à leur enthousiasme lorsqu’une voix timide a interrompu le flux de la conversation: “Avez-vous déjà fait des expés avec des moins valides ?” C’est avec ces mots que j’ai fait la connaissance d’Arthur. Ils m’ont transformé. Je n’étais jamais parti avec un « moins valide ».

Nous avons fait plus ample connaissance chez moi le lendemain autour d’un bon repas. Le courant est tout de suite passé. Arthur a eu un accident chez les scouts à 13 ans dans lequel il y  perdu l’usage de ses membres inférieurs. Moi, je découvrais un jeune gaillard de 19 ans, en chaise roulante certes, mais avec un appétit de vie communicatif. Il m’a convaincu et je lui ai proposé de nous accompagner dans la descente du Haut Allier (Auvergne) en packraft. Ses yeux se sont illuminés. Les miens allaient s’ouvrir et découvrir des choses qu’ils n’avaient encore jamais vues.

Au moment de charger tout sur les packrafts,  je lui ai dit : « Arthur, on doit laisser ta chaise dans la voiture, on se débrouillera avec tes béquilles. » Un nuage d’angoisse a traversé son regard mais cela n’a pas duré. Arthur est ainsi fait. Il se déplaçait difficilement avec ses béquilles mais nous pouvions l’aider, voir le porter. Il a fait confiance et a claqué le coffre de la voiture. Quelque chose allait se passer.

Nous avons descendu le Haut Allier à trois avec Mathieu, ce fidèle compagnon de tant d’aventures, moniteur ADEPS de kayak en rivière. Très vite, il est apparu que c’était moi qu’il fallait toujours attendre. Je dois l’admettre je suis plus à l’aise en montagne et sur des parois verticales que sur l’eau. Arthur, lui, était impressionnant dans ces rapides (http://capexpe.org/allier2012/). Ce furent trois journées magnifiques au bout desquelles Arthur nous a avoué que, sans sa chaise, il avait retrouvé des sensations de liberté qu’il n’avait plus ressenties depuis l’accident. Mais, surtout, une amitié aussi énorme qu’improbable avait vu le jour.

Ce n’était qu’un début et après délibération avec Mathieu, nous lui avons proposé de nous accompagner  en Alaska pour descendre deux rivières dans les Brooks Range au-dessus du cercle polaire. L’apogée de cet incroyable défis sera la partie de 70 km à faire à pied en passant un col entre les deux rivières.  Restait le moyen de passer avec Arthur. C’est là que sa réponse nous a laissé pantois. «  Je suis super chaud mais à une condition : je ne veux pas que vous m’aidiez pour le raccord de 70 km à pied. J’ai un an pour réapprendre à marcher. »

C’est ainsi que depuis plus d’un an, en plus de la compétition de handi-basket où il excelle, Arthur entraîne spécifiquement les quelques fibres musculaires qui lui restent dans les membres inférieurs avec un kiné tortionnaire. Nos balades d’entraînement dans le bois de Lauzelle à Louvain-la-Neuve se sont ainsi faites de plus en plus longues pour culminer dès janvier en une traversée de 14 km, en béquilles, des Fagnes wallonnes couvertes de neige.

Nous sommes 6 et  le 12 juillet prochain, nous nous envolerons pour l’Alaska et un périple de 4 semaines au milieu des caribous et autres Grizzlies. Cette expédition est d’ores et déjà une histoire incroyable.

Depuis des années avec Cap Expé, je prêche à tout qui veut l’entendre qu’il faut oser rêver, mettre ses rêves en musique et surtout suivre cet élan jusqu’au bout. Au contact d’Arthur, je suis passé de la rhétorique au mouvement, de l’escalade à la danse, de l’idée d’un possible à l’Amitié.

Nous sommes tous à un moment ou à un autre “moins valides”. Que ce soit la maladie, l’accident, la disparition d’un être cher, l’échec, le surmenage ou encore, simplement le poids des ans,  tous, un beau jour, nous abordons les grands espaces de nos fragilités. La plus grande des Expés peut alors commencer. C’est à cette expé-là que nous aimerions aussi vous convier. Au delà du challenge d’Arthur, il y a nos propres fragilités et surtout cette force que nous pouvons découvrir en nous pour les transcender. Le pouvoir des rêves n’a pas de limite.

Avec l’aide d’un ami cinéaste,  nous comptons ramener un film et raconter cette aventure humaine, vécue ensemble au cœur des grands espaces d’Alaska.

Vous trouverez plus d’infos à propose de notre expédition sur notre site web http://www.capexpe.org/alaska2014 et sur notre compagne de financement du film sur http://www.triangle7.com/Crowdfunding/ .

Dom