Vamos a descubrir las montanas chilenas…

Partie précédente du récit

Nous passerons ensuite la journée suivante dans le bus pour revenir à Puerto Montt. Ce sera également notre dernier vrai contact avec la civilisation pour les 25 jours qui vont suivre: il a donc fallu passer au supermarché pour acheter pour 25 jours de nourriture… sachant que dans la Vallée de la Junta, il n’y a rien… Donc… on prendra des spaghettis, des pâtes, du riz, de la purée… en poudre évidemment, …, … une alimentation équilibrée comme tout un chacun en rêve ! Bon, on n’a aucune idée si les quantités sont adéquates… mais on se retrouve avec un ***** de volume de nourriture.

 

Lourdement chargés...

Lourdement chargés…

Après une dernière nuit dans la civilisation, nous prenons un bus qui nous emmène au village de Cochamo… fort de nos 6 sacs et de nos 3 énormes caisses de nourriture, nous ne nous sommes pas attirés la sympathie du chauffeur (ni même des autres locaux…). Mais nous arrivons sans encombre dans le petit village de Cochamo (un téléphone en moins). C’est de là que le lendemain nous chargerons des chevaux qui monteront les quelques 120 kg de tente, matériel d’escalade et nourriture vers la vallée de la Junta! Après un bon 4h de rando, nous nous retrouvons à la plaine qui nous servira de camps de base pour les 25 jours suivant. Sur la route vers l’Argentine, la vallée attire de plus en plus les touristes de passage et les grimpeurs qui siègent sur place plus longtemps (certains des mois durant). La vallée est entourée de blocs granitiques qui constitueront notre terrain de jeu pour le prochain mois. Le confort est au top: pas de courant, pas d’eau chaude, pas de network/internet/téléphonie mobile… juste la Nature, seulement la Nature et rien que la Nature!
Nous prendrons le temps de nous trouver un endroit confortable (apparemment, le choix de l’emplacement est stratégique… ),

Nos porteurs!

Nos porteurs!

de monter les tentes et de trier la nourriture (les oeufs sont entiers! oh miracle) et de nous installer comme il se doit. Ensuite, une rapide exploration pour prendre connaissance avec les environs: le camp est presqu’entouré de rivières qui se traversent par des tyroliennes (cables suspendus au-dessus de l’eau), il n’existe pas (encore) de guides d’escalade de la région, les infos se transmettent dans des fardes qui trainent près d’un local dans le camping. Les topos consistent simplement en quelques dessins réalisés par d’autres grimpeurs et quelques annotations… le reste se transmet de bouche à oreille! L’aventure quoi!

Et ensuite, on terminera la journée par une question qui sera récurrente dans le mois qui suivra: riz, spaghettis ou purée?

Arrivé à la Junta: Home sweet home!

Arrivé à la Junta: Home sweet home!

 

Tyrolienne d'approche

Tyrolienne d’approche

Le lendemain, on décide d’attaquer par une petite voie “pas trop loin” du camp… et c’est là que l’aventure a commencé: on n’a pas trouvé le sentier (mais après coup… peut-on vraiment appeler cela un sentier?) qui monte vers la face… après une tyrolienne sur un cable douteux, on a suivi un sentier qui monte dans la brousse et qui monte… et qui monte… avant de se rendre compte qu’on était complètement à côté de la plaque… donc on a suivi le sentier qui descend, qui descend qui descend, on a réussi à louper la tyrolienne, on s’est retrouvé à traverser le torrent à pied nu… (splendide paysage d’ailleurs) pour se retrouver au camp de base tout penauds… epic fail ! comme diraient les jeunes des temps modernes. Bref, une splendide randonnée pour la matinée (mais si on avait su, on n’aurait pas pris le matos) et ensuite, on est reparti… cette fois-ci, on trouve le bon “sentier”… on a dû chercher pas mal de temps pour trouver la tyrolienne qui traverse la rivière et qui cette fois-ci est constituée d’une vieille corde légèrement douteuse!

Topo de camp farm

Topo de camp farm

Et ensuite, c’est dans une jungle qu’on remonte vers le pied de la face où on arrive royalement 3 heures plus tard que prévu et complètement exténués! Welcome to Cochamo! La voie du jour se nomme “Camp Farm” et remonte une face de 1000 mètres… sur 300 mètres. Une première longueur splendide de dalle (mais dur !!!!) me fera sortir de mes gonds: entre la chaleur épouvantable et puis… les tabanos !! Les taons qui tournent autour de toi quand tu grimpes et qui te piques (ou essaies de te piquer)… bref, pas évident de rester concentrer sur son escalade ;-)! Ensuite, les longueurs se suivent et s’enchainent… avec notamment un joli offwidth qui se termine en fissure pour Bernard… le soleil tape et la déshydratation n’est pas loin! Après les 7 longueurs de grimpe, nous nous retrouvons au sommet de cette voie qui se termine au milieu de cette face qui est… énoooooorrrrrmmmmee (that’s what she…). On redescend et c’est totalement cramé qu’on termine cette première journée qui était censée être soft…

 

First Pitch of Camp Farm

First Pitch of Camp Farm

Je vais résister à cette tentation oh combien tentante de décrire ces 3 semaines au jour le jour et me contenterai de quelques highlights bien choisis…
A commencer par quelques voies de 4 longueurs pour le second jour où, conseillé par un local nous nous attaquons à une voie magnifique… Bernard se retrouvera dans un dièdre crasseux et humide à souhait… pour ma seconde longueur je me retrouverai en train de grimper à l’arbre avant de prendre une belle baffe sur une fissure qui traverse horizontalement et qui me fera chuter plusieurs fois mais le meilleur sera pour Bernard qui attaquera la longueur suivante en mode “artif” vu la difficulté de placer des protections et qui arrachera d’ailleurs toutes ses protections dans un vol qui restera dans nos souvenirs! Bref, on redescendra également tout penauds et rentrerons au camp un brin déconfit!

A côté du camps de base...

A côté du camps de base…

Je ne peux rédiger ces quelques lignes sans mentionner les marches d’approche: entre 2h et 3h30 de marche d’approche en fonction des différents sites. Il nous aura fallu souvent être “judicieux” et monter du camp de base la veille vers le pied de la face qui nous intéresse pour pouvoir attaquer le lendemain de bonne heure! Ces marches d’approche nous aurons “TUE”, ca monte raide, très raide! Parfois à travers tout et après un jour de pluie dans la boue… un défit physique quasi permanent et quasi quotidien! Le tout avec les cordes, le matériel d’escalade, parfois une tente, de la nourriture pour quelques jours! Des kilomètres de rando… des kilomètres de course à pied en descente (parfois ressemblant plus à du ski sur boue… ponctué de petits dérapages, grandes glissades et splendides retournés accrobatiques!).

 

 

 

 

Crux de EZ does it

Crux de EZ does it

La première longue voie que nous attaquerons se nomme “E.Z. does it”. C’est après une longue approche de nuit, une nuit sous la tente sous la face que nous attaquerons ces 12 longueurs… après avoir galéré pour trouver le départ! Car un petit croquis qu’on a tant bien que mal recopié (mes talents d’artiste étant au moins aussi évolué que mes talents de danseur de salsa sus-mentionnés) depuis la vallée semble bien dérisoire quand on se retrouve face à des centaines de mètres de granit pour trouver “LE” départ… qu’on finira par trouver! La voie est engloutie… une escalade assez pure et belle! Et on se retrouve rapidement au sommet. Dans l’affreuse descente, on fera la rencontre de la pluie de Patagonie… ou devrais-je dire du déluge (Noé aurait commencé à bâtir une arche)! On se fera tremper, rincer… on terminera en courrant sous la tempête et sous les orages pour finir par atteindre la tente laissée au pied de la face (quelle grande idée de l’avoir montée et de ne pas avoir parié sur le beau temps!). On se retrouvera donc au sec… à siroter une bière… on accueillera une cordée de brésiliens qui hallucineront de voir une tente à cet endroit avec 2 gars à moitié à poil dedans en train de boire des bières… et puis, il a fallu constater: la tente se situe juste sous une face de 1000 mètres de haut. Cette face s’est transformée en cascade géante… des énormes chutes d’eau s’écoulent çà et là de la face… c’est HYPER impressionant. J’ai l’impression de me retrouver face à une cathédrale en plein orage avec les gargouilles qui recrachent tout… mais face à une cathédrale de 1000m de haut! Autour de la tente, certains endroits se transforment en torrents… et c’est avec un peu de chance que la tente fut en fait plantée de façon tout à fait idéale! On prendra la décision (une fois les bières écoulées) de redescendre sous la pluie… le sentier s’est transformée en torrent et en champs de boue… ce fut une partie de plaisir! Pour revenir au camp de base où un arbustre s’est abbatu sur notre seconde tente! Welcome to Cochamo! Les éléments se déchainent!

Over the rainbow...

Au dessus d’une mer d’ouate… sensation étrange, nous sommes coupés du monde…

Et étonnamment, on jouera un coup de pocker le lendemain: après avoir passé la journée à scruter le ciel en grand professionels de la météo que nous sommes, nous décidons de remonter vers notre “camp avancé”, vers notre tente lâchement abandonnée là-haut! Vu la difficultée de la rando d’approche, on la fera de nuit et on arrivera au pied de la face au milieu des étoiles… Le projet pour le lendemain est ambitieux: Bienvenidos a mi Insomnio. Description du topo: “ One of the longest all-free routes in Cochamó and South America at its grade… At base of Trinidad, you can crawl into your sleeping bag, stare at the wall as you try to sleep. If you’re planning to climb it tomorrow, the enormous wall can be intimidating and may not let you sleep. Its only a few hours until you have to wake up in the dark to be able to reach the peak in one day. I don’t want to mention storms if you plan to sleep in the bivy ledges at pitch 13. Enough reading about this route. Get some sleep and sweet dreams.” Tout est dit! Sweet dreams baby!

C’est un peu stressé par la météo toujours pas optimale et un peu tendu par le défit du lendemain (on parle de 1000 mètres d’escalade dans la journée… et il faut sortir) qu’on se couchera et on dormira finalement relativement peu (le topo avait donc bel et bien raison)! Cette voie porte bien son nom! C’est d’ailleurs au milieu de la nuit qu’on se lèvera, qu’on attaquera la journée par un café bien corsé et qu’on se mettra en route! La voie commence juste là… ya plus qu’à! Les 100 premiers mètres se font en corde tendue et puis… on se relaye pour leader le tout! Quelques splendides longueurs de pure fissure nous attendent… en cette matinée, la vallée est plongée dans la brume qui a suivi la tempête de la veille… nous sommes au dessus des nuages, juste entourés par le rock avec plus aucun contact avec le sol… juste une mer d’ouate sous nous… c’est vraiment une ambiance hallucinante, d’un autre monde… les mots ne suffisent pas à décrire! Un peu stressant aussi de se sentir si isolés, en sachant que la seule possibilité est de sortir de la voie, idéalement avant la tombée du crépuscule! La suite nous réserve 2 longueurs ultra techniques et plein gaz qui traversent au milieu de la face…

Que dalle...

Que dalle… traversée bien technique de “Bienvenidos a mi insomnio”

qui continuent par des longueurs plus physiques dans lesquelles Bernard a failli se prendre le vol du siècle (je vous jure que je le voyais partir… lui aussi s’est senti partir d’ailleurs). La suite consistera en quelques longueurs un peu plus cassées et moins jolies qui nous ont conduits à un ptit bijou sur la fin: une splendide fissure à doigts (mes préférées…) tout là haut en avant-dernière longueur! En plein vent, ca souffle comme dans un réacteur d’avion: très difficile de garder son équilibre et en fin de journée, il faut garder son calme et rester zen! Mais c’était splendide… j’hésite même à utiliser le terme jouissif… C’est finalement après 11h de grimpe non stop que nous parvenons au bout de nos insomnies! La descente emprunte le même pierrier que deux jours auparavant (bref, la descente est cassante) et on reviendra bien cassés à la tente… au moment où quelques autres grimpeurs rejoignent la face pour profiter du beau temps du lendemain! Notre pari météorologique s’est donc avéré payant et c’est une jolie croix dans notre tick list!

 

 
Suite du récit par ici…

Summit of E.Z. does it

Summit of E.Z. does it