Rédaction Mathieu Chable.
Le but est de rejoindre le lac Råstojaure, très au nord de la Suède, en partant de la frontière Finlandaise. Ensuite, continuer le sentier qui passe au nord-est du lac pour gagner les rivières Gorvvejohka et Taavaeno, atteindre la confluence avec la rivière Rostoeatnu, la remonter vers le lac Råstojaure pour la descendre et enchainer avec la rivière Lainioälven jusque Övre Soppero.

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Mardi 15/06. Biggosjohka-quelque part le long de la Rostoeatnu. 13 km à pied et quelques-uns en packraft.

Notre but est de remonter le plus possible vers le lac Råstojaure. Nous visons le lac Vutnosjavri qui se déverse dans la rivière. Les sacs sont prêts, la trace du feu invisible, nous prenons alors la longue bande de sable qui se dirige vers le nord. Après avoir traversé un énième ruisseau, c’est ensuite une alternance de pierriers, marais, petits sommets, toundra sous un vent qui nous paraît forcir. 

En regardant la surface de l’eau, nous pouvons comprendre que le vent est vraiment très fort. Nous n’irons pas jusqu’au petit lac que nous voyons un peu loin, tout au plus 3 km, le vent nous serait latéral, une horreur en packraft. 

Nous décidons de bifurquer directement vers la rivière et d’embarquer. Le vent est fort, nous devons être vigilants et lester nos packrafts pendant la préparation. Si un packraft part sur la rivière avec ce vent, il sera très difficile de le récupérer. Heureusement, ce vent violent sera dans notre dos. Le début de la rivière est très large avec des déversoirs parfois importants, comme ce premier gros rapide de classe IV que je décide de porter. 

C’est la fin de la journée, nous sommes fatigués et la moindre petite erreur pourrait avoir de graves conséquences. Nous pagayons assez vite pour nous réchauffer, mais rien n’y fait, sous ce vent avec une température avoisinant les 5°C et mouillés par les vagues, nous prenons vraiment froid. Sous nos combis sèches, nous portons notre sous-vêtement et une polaire, le bonnet sous le casque et des manchons aux mains. J’ai de simples manchons en tissu très fin, c’est suffisant pour ne pas avoir froid aux mains. Aurel et Sylvain ont des manchons en néoprène, bien plus aisé à enfiler, mais quel poids ! À chaque fois que j’enfile les miens et m’aide des dents pour enfiler ce dernier, ils rigolent bien de ces gesticulations.

Nous prenons trop froid, c’est dans de pareils moments que le risque d’accidents est important. Je décide que nous devons nous arrêter au plus tôt. Je demande à Aurel de nous trouver un endroit abrité du vent, en tout cas moins exposé. La tâche n’est pas aisée, la rivière coule entre des berges à peine vallonnées. Il part longtemps. Sylvain et moi, nous abritons comme nous le pouvons derrière des bosquets de saules. J’avale une double dose de barre d’énergie. Aurel revient sans résultat, nous essayons un peu plus loin. À la troisième tentative, après une longue absence, il revient avec le sourire. Ouf ! Nous débarquons et le rejoignons derrière un léger repli assez profond pour nous protéger. Emplacement idéal, assez grand pour nos tentes. Ma première tâche est de faire une soupe bien chaude que nous apprécions pleinement, adossés au dosseret du repli. Pendant que je chauffe la soupe, Sylvain monte la tente et gonfle également mon matelas. Quelle équipe ! Rapidement, nous reprenons de la chaleur, la soupe est vite suivie du repas. Et bonheur, le soleil apparaît alors que nous mangeons. Nous sommes heureux, là, tous les trois, à rigoler de notre journée. Je me mets dans mon sac de couchage en sachant que la nuit sera froide pour moi.

Le froid n’est pas ressenti de la même manière par tous. Sur les berges ventées de la rivière, les Chevaliers arlequins se pavanent, pas encore dans leur livrée nuptiale complète mais quasi. Ils partagent les berges avec les grands aboyeurs. Seules les Sarcelles d’hiver se mettent à l’abri du vent pour barboter, les Harles continuent leur pêche au milieu des vagues.

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