Réalisation d’un vieux rêve : la traversée de la Scandinavie en partant avec une Pulka sur roulette de Bruxelles.
L’aventure est arrêtée au milieu par un avalanche. Un incroyable récit de survie : https://capexpe.org/groups/scandinavie2008/gpages/lavalanche
Kolåsen, le 9 mars 2008
Bonjour à tous,
Après quatre jours de marche depuis Meråker, j’aboutit ce soir dans un petit village isolé au bout d’une route en cul-de-sac, dernier bastion des snowmobiles au bord de l’immense wilderness (?) suédoise…
Dans les rues de Kolåsen
Sjur, qui tient le camping dans lequel j’ai logé à Meråker, m’a conduit au plus loin sur ma route, au pied de l’immense talus levé par les engins de déneigement sur le plus lointain parking accessible.
Je n’ai pris aucun plaisir à marcher jeudi, dans la neige profonde et le violent vent de côté, ne faisant que me répéter “Je hais la Scandinavie, je hais la pulka, je hais la neige, je veux être à la plage”. Mais la répétition de ce mantra sur un ton plaintif n’a rien arrangé… Bref, il fut un momemt où, aveuglé par la neige que soulevait le vent, j’ai pris la décision de faire demi-tour. Ne plus avancer sans visibilité! J’ai profité d’un auvent rudimentaire (trois parois et un toit) pour y monter ma tente, à l’abri du vent qui redoublait d’intensité. J’ai même pris peur que mes skis ne s’envolent…
Mais pourquoi ont-ils tenu à mettre ce poteau au milieu??
“Le calme après la tempête” ne saurait que trop exprimer la quiétude du lendemain matin. Le passage des scooters m’a tiré de ma grasse matinée, que j’aurais volontiers prolongée s’il n’y avait eu ce grand soleil. A l’extrémitée du lac, j’ai quitté les lieux fréquentés pour remonter une longue, interminable vallée garnie d’une épaisse, exténuante couche de neige fraîche. La forêt est envoûtante mais détestable. La végétation coupe le vent, si nécessaire pour souffler et durcir la neige. Chaque pas est un combat, recommencé mille fois pour arracher ma charrue à cette pâte blanche et collante. Une seule idée: s’élever là où la végétation se réduit à quelques arbrissaux torturés. A l’issue d’une longue journée de marche, derrière ce col, dans une lumière irréelle, j’ai plongé vers le lac suivant. La nuit m’a ordonné de planter la tente à une encablure de la frontière suédoise.
Samedi et dimanche m’ont gratifié d’un temps stable et même assez ensoleillé, que je ne croyais plus possible en ces contrées. L’inconvénient est la hausse de la température, qui devait approcher les 10C, sinon plus au creux des cuvettes abritées… Sous des nuages de vapeur, j’ai avancé comme un forcené, prenant beaucoup de plaisir a enchaîner les cols, les lacs, les forêts. Les pistes pour motoneiges m’ont été salutaires, me permettant de couvrir pas moins de 30km par jour sur leurs rubans bien dammés. Elles seront désormais mon fil conducteur. Il y a bien sûr également le ronronnement des moteurs et les vapeurs d’essence, mais les sympathiques signes de la main que j’échange avec les conducteurs des engins m’apporte un peu de présence. Et la nature suédoise, sinon
intacte, du moins immense, limitée seulement par l’horizon lointain…
Cet après-midi, j’ai rencontré un skieur muni du même équipement que moi, et j’ai su immédiatement qu’il allait loin. Ralf est suédois, il a 64 ans et habite Uppsala. A un mois de la retraite, il a décidé de marcher d’une extrémité à l’autre des montagnes suédoises. Il est parti voici deux semaines et compte marcher jusqu’au début du mois de mai. Je suivais depuis la veille ses traces soufflées par le vent… sans trop oser croire qu’il s’agissait d’un marcheur au long cours.
Nous avons fait route ensemble sur la faible distance qui nous séparait encore de Kolåsen. Puis nous avons loué pour un prix raisonnable (le village est désert) un chalet tout confort qui nous permettra de passer la nuit au chaud, sécher notre équipement, recharger nos batteries, … Me voici à tapoter sur le clavier de la réception de l’hôtel, tout aussi désert.
Nous pourrions peut-être marcher ensemble quelque temps. Lui aussi a rendez-vous avec des amis à Valsjöbin, le 14. Rémy m’y rejoindra le 15 au soir. Ralf a le projet de passer la nuit suivante dans le chalet de montagne de l’un de ses amis. L’accès en est pénible, au travers d’une raide forêt, cauchemard des pulkas. Mais je crois que je vais l’accompagner. Nous n’avons pas encore eu le temps, ce soir, de parler itinéraire. D’abord une douche.
Bisous à tous,
Nico