Traversée à la voile de l’île Maurice à l’Afrique du Sud. Passage obligé et redouté par les voiliers qui font un tour du monde.
Beaucoup d’évènements se sont passés avant d’en arriver à cet instant, ancre tombée au mouillage à Grand Bay à l’île Maurice, un moment presque inespéré aux vues des dernières semaines.
Petite mise en contexte, je viens de finir mes études d’ingénieur civil à Louvain-la-Neuve et j’ai soif d’aventures. J’ai décidé de prendre quelques mois de “repos” avant de me lancer dans la vie active. L’idée de faire une grande traversée à la voile me trotte dans l’esprit depuis quelques mois. S’imaginer au large, pendant des jours, m’inspire. Je me demande comment mon esprit réagirait à une coupure si brutale à la société. De plus, la saison des transatlantiques approche, c’est le moment idéal. Les recherches sur les groupes Facebook et les sites de bourses d’équipiers battent leur plein pendant des semaines durant. Je tombe finalement sur une annonce bien différente de celle que je recherche initialement, de l’autre côté du globe même. C’était non pas une traversée de l’Atlantique, mais une traversée de l’île Maurice à l’Afrique du Sud. Un capitaine français de 61 ans, Jacques, cherche un équipier pour l’aider dans ce voyage. J’envoie un message, je n’ai rien à perdre.
1 mois plus tard, nous voilà à Maurice avec ma copine Anne-Laure. Nous avons profité de ma traversée pour passer deux semaines ensemble aux préalable sur l’île. Un séjour dans cet endroit magnifique qui me remplit de
motivation pour ce qui m’attend. Malheureusement, les travaux sur le bateaux qui devaient être finis avant mon arrivée trainent. J’apprends que les toilettes ne fonctionnent pas, et le four non plus. Ce qui s’annonçait déjà comme une belle aventure s’annonce encore plus corsé que prévu.
Anne-Laure s’en va, quelques jours plus tard le bateau est enfin sur l’eau, avec plus de 3 semaines de retard… Nous voilà déjà en retard sur le planning mais pas de stress, nous avons bien le temps. Au programme, 3 jours de navigations autour de l’île et puis grand départ pour l’Afrique du Sud. La traversée prend normalement entre 10 et 15 jours. De quoi se reposer quelques jours à Richards Bay avant de poursuivre vers Cape Town.
Mais pourquoi ce passage est-il considéré par beaucoup comme le plus compliqué de leur tour du monde ? Je me suis donc renseigné avant de partir. Le nerf de la guerre, c’est le courant.
En effet, le long de la côte est de l’Afrique du Sud sévit le courant des Aiguilles. Un des courants costal les plus forts du monde, qui s’écoule vers le Sud avec une vitesse pouvant atteindre les 5 nœuds. Quand une dépression se présentent et que des vents du sud-ouest débarquent, cela crée des vagues de courant déferlantes pouvant atteindre plus de 10m avec une période de 6s. Autrement dit, ce ne sont vraiment (mais alors vraiment) pas des conditions dans lesquels un voilier veut être coincé. En petit bonus, la pointe sud de Madagascar possède elle aussi un courant pouvant amener une mer forte et imprévisible.
Pour nous aider dans ce périple, Des Cason, un capitaine sud africain avec plus de 15000 miles dans les eaux de la région qui propose ces services de routeur et des prévisions météos gratuites. Autrement dit, un gars en or.
Après les courses au marché de Port-Louis, l’heure de la navigation a enfin sonné. Nous partons pour 3 jours de navigation et mouillage autour de l’île Maurice pour s’amariner. De ces 3 jours, je retiendrai surtout notre mouillage à l’île Plate. Loin de toute l’agitation de l’île principale, une plage paradisiaque de sable blanc s’étend sur des dizaines de mètres, jonchée de magnifiques coraux et coquillages en tous genres.
La suite du récit sera composée de mon carnet de bord que j’ai rédigé pendant la navigation. J’ai décidé de laisser le texte tel quel, histoire de transmettre au mieux mon ressenti à chaud et mon état d’esprit à ce moment là.